La dette de l’indépendance ou le néocolonialisme par la dette⚓
Présentation de la séquence et documents à télécharger⚓
Compétence(s) ciblée(s)
Rassembler, critiquer, analyser et synthétiser une documentation historique. En communiquer la synthèse.
Périodiser et maîtriser les temporalités plurielles des sociétés présentes et passées.
Construire en histoire une conscience citoyenne apte à développer un agir social.
Savoirs, savoir-faire, savoir-être/attitudes à acquérir
Mener une enquête à partir de la recherche de différents documents historiques et présents, les dater et les authentifier, en faire l’analyse critique (externe et interne).
Faire une analyse historique du vocabulaire utilisé dans les différents documents.
Réaliser un dossier de presse documenté.
Construire un argumentaire et se forger une culture du débat dans l’attention critique aux controverses contemporaines (initiation à la démarche historiographique).
Prérequis
La séquence suppose la connaissance critique de l’économie de plantation esclavagiste, de la Révolution et de l’indépendance haïtienne, ainsi que des premières décennies du XIXe siècle tant en Haïti (situation socioéconomique et politique sous les gouvernements de Christophe, Pétion et Boyer) qu’en France et dans les relations internationales (voir entre autres les séquences de 8e « L’esclavage et l’économie de plantation » et « La Révolution haïtienne (1791-1806) ») et de 9e années (« La formation de l’État haïtien 1804 – 1843 »).
Plus globalement, la séquence invite au préalable, en termes de prérequis, à vérifier le niveau des compétences développées dès la séquence de 7e année « Faire de l’histoire » dont l’approfondissement sera poursuivi dans la suite de la 9e année du fondamental :
Construire une chronologie.
Situer un document dans son contexte de production et de circulation.
Être capable de mener une recherche simple dans un dictionnaire ou une encyclopédie historique tout en appréhendant les évolutions linguistiques et sémantiques.
Savoir conduire des recherches sur Internet dans une démarche critique : recherche simple et recherche multicritère utilisant des opérateurs booléens.
Être capable de lire, de formuler des hypothèses et une problématique, d’exercer la critique et l’analyse de documents pour les traiter : extraits de presse, documents officiels et diplomatiques, documents économiques…
Savoir réaliser une courte fiche de synthèse.
Être capable de préparer une argumentation historique et de l’utiliser dans un débat.
Stratégie d’enseignement-apprentissage
La séquence est à penser sur le temps long (de l’indépendance à nos jours) et occupe ainsi presque l’ensemble de la 9e année du fondamental, avec des moments de cours et des moments de recherche des élèves hors des cours guidés par le professeur, destinés à construire une chronologie et un dossier de presse de la question jusqu’aux débats actuels.
La question est sujette aux polémiques, comme aux jugements moraux (très présents dans les documents utilisés), le professeur guide donc les élèves dans la formulation d’hypothèses dument étayées, le questionnement, l’analyse critique, la confrontation et la synthèse des documents en attirant l’attention des élèves sur le vocabulaire (une ordonnance n’est pas un traité, qui, seul, au regard du droit international, engage les deux parties, voir le débat autour de la loi de répartition de l'indemnité aux anciens colons votée le 30 avril 1826, in Jean-François Brière, op. cit). Il met en place avec les élèves la recherche à mener tout au long de la 9e année prépare les élèves, les guide et les suit dans la construction progressive de la chronologie, du dossier de presse et des notices biographiques sur les principaux acteurs, ainsi que dans la construction d’un argumentaire historique pour comprendre et intervenir dans les débats, entre autres autour du néocolonialisme aux XIXe et XXe siècles et des questions de « restitution et réparation ».
Découpage en séances
Durée totale : 6 h et suivi de la question dans les séquences d’histoire sur l’ensemble de la 9e année
Séance (Titre et durée) | Thème, place dans la séquence et très brève description |
séance 1 La dette et le développement d’Haïti, un débat contemporain ? (2 h) | La première séance est construite selon une approche régressive de l’histoire, en partant du questionnement des débats contemporains pour questionner et problématiser les différents contextes historiques de l’établissement de la dette, de son règlement et des conséquences dans le développement d’Haïti jusqu’au temps présent. Elle suppose, si c’est possible, une double recherche des élèves en amont permettant, entre autres de vérifier les acquis et les prérequis sur la chronologie et l’analyse critique de documents. Elle s’inscrit dans le temps long de la 9e année (de l’indépendance et de la création de la nation et de l’État haïtiens à nos jours avec des retours aux séquences de 8e année sur l’économie de plantation esclavagiste et la Révolution), en initiant, à partir de la lecture d’extraits de presse contemporains, un questionnement historique qui va croiser toute l’histoire politique, économique, sociale et culturelle des XIXe, XXe et XXIe siècles en Haïti et dans les rapports d’Haïti avec les autres États. Cette première séance nécessite au minimum deux heures consécutives ou séparées dans le temps. |
séance 2 La dette de l’indépendance, négociation et imposition (1) (1h et plus si nécessaire) | La séance, en se référant aux séquences sur la fin du XVIIIe et le début du XIXe siècle a pour objectif de faire le point sur la situation intérieure et extérieure d’Haïti, la question de la dette d’indépendance et sur quelques aspects des relations internationales au moment du congrès de Vienne (1814-1815). |
séance 3 La dette de l’indépendance, de la dette à « la double dette » (1) (1 h) | La séance est centrée sur l'ordonnance 17 avril 1825, l’imposition sous contrainte de la dette et son acceptation. |
séance 4 La dette de l’indépendance, de la dette à « la double dette » (2) (1 h) | La séance a pour objectif, à partir de la renégociation de la dette et des traités de 1838, de questionner et d’analyser la série des emprunts qui grève le développement d’Haïti jusqu’au XXe siècle et d’en construire une chronologie servant de base à la compréhension et au suivi des débats sur la question de le la dette, du néocolonialisme et du développement. |
Support et matériel
La question de la dette, de ses conséquences pour le développement de Haïti a donné lieu à une abondante littérature que les utilisations au service de différents intérêts et les partis pris, de 1814 jusqu’aux publications récentes du New York Times, rendent difficile d’accès. Pour un résumé rapide et une première approche des faits, le professeur pourra s’appuyer sur :
Beauvois Frédérique, « Monnayer l'incalculable ? L'indemnité de Saint‑Domingue, entre approximations et bricolage », Revue historique, vol. 655, no. 3, 2010, pp. 609-636 [https://www.cairn.info/revue-historique-2010-3-page-609.htm].
Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001.
Blancpain François, Gainot Bernard, « Les négociations des traités de 1838 », La Révolution française, 16 | 2019, [http://journals.openedition.org/lrf/2757], ainsi que sur François Blancpain, « L’ordonnance de 1825 et la question de l’indemnité » et Gusti Klara Gaillard-Pourchet, « Aspects politiques et commerciaux de l’indemnisation haïtienne », in Bénot Yves, Dorigny Marcel (dir.), Rétablissement de l’esclavage dans les colonies françaises. Aux origines de Haïti, Paris, Maisonneuve et Larose, 2003, pp. 221-229 et 231-237.
Brière Jean-François, « La France et la reconnaissance de l'indépendance haïtienne : le débat sur l'ordonnance de 1825 », French colonial history, 2004, vol. 5, pp. 125-138 [consultable sur JSTOR].
Bruffaerts Jean-Claude, Dorigny Marcel, Gaillard Gusti-Klara, Théodat Jean-Marie, Haiti-France. Les chaines de la dette: Le rapport Mackau (1825), Maisonneuve & Larose / Hémisphères Editions, 2022.
Eugène Itazienne, « La normalisation des relations franco-haïtiennes (1825-1838) », pp. 139-154 ; Blancpain François, « Note sur les ‘dettes’ de l'esclavage : le cas de l'indemnité payée par Haïti (1825-1883) », pp. 241-245, In Outre-mers, tome 90, n° 340-341, 2e semestre 2003, numéro spécial Haïti Première République Noire, Marcel Dorigny (dir.). Voir aussi les annexes : L'ordonnance de Charles X du 17 avril 1825, p. 249 ; Mode d'évaluation du montant de l'indemnité fixée par l'ordonnance de 1825, pp. 249-250 ; Proclamation du président Boyer acceptant l'ordonnance française, p. 250 ; Les deux traités de 1838, pp. 251-252 ; Schoelcher et la dette de l'indépendance, pp. 252-254 [https://www.persee.fr/issue/outre_1631-0438_2003_num_90_340].
Fouchard Jean, Histoire d’Haïti 1804-1890, tome 2, Port-au-Prince, Éditions Henri Deschamps, 2017.
Gaillard-Pourchet Gusti-Klara, L'expérience haïtienne de la dette extérieure, ou, Une production caféière pillée : 1875-1915, Port-au-Prince, Imprimerie H. Deschamps, 1990. Gusti-Klara Gaillard a donné une interview au Nouvelliste sur la dette à propos du dossier du New York Times : "Pour l’historienne Gusti-Klara Gaillard les articles du New York Times sur la « double dette » feront date", interview par Frantz Duval, Le nouvelliste,27/05/2022. [https://lenouvelliste.com/article/236053/pour-lhistorienne-gusti-klara-gaillard-les-articles-du-new-york-times-sur-la-double-dette-feront-date].
Gainot Bernard, Régent Frédéric (dir.), 1801-1840 – Haïti, entre Indépendance et Restauration, La Révolution française. Cahiers de l'Institut d'histoire de la Révolution française, 16 | 2019 [https://journals.openedition.org/lrf/2643], voir notamment : Blancpain François, Gainot Bernard, « Les négociations des traités de 1838 » [https://journals.openedition.org/lrf/2757] ; Gusti-Klara Gaillard-Pourchet, « Haïti-France. Permanences, évolutions et incidences d’une pratique de relations inégales au XIXe siècle » [http://journals.openedition.org/lrf/2844].
Hector Michel, « Jalons pour une périodisation », in Michel Hector, Laennec Hurbon (dir.), Genèse de l’État haïtien (1804-1859), Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009.
Saint-Louis Vertus, « Commerce extérieur et concept d’indépendance (1807-1820) », Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009.
Pour les textes officiels, ordonnances, traités, lois, constitutions…, leur présentation et leur étude, voir :
Digithèque de matériaux juridiques et politiques : Domaine des Constitutions de Haïti [https://mjp.univ-perp.fr/constit/ht.htm] ; domaine des constitutions françaises [https://mjp.univ-perp.fr/france/france.htm].
Janvier Louis-Joseph, Les constitutions d'Haïti (1801-1885), Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1886 [consultable sur Gallica].
Linstant de Pradine, Recueil général des lois & actes du Gouvernement d'Haïti depuis la proclamation de son indépendance jusqu'à nos jours, Paris, Auguste Durand, Tome I 1860 (1804-1808), II (1809-1817), III (1818-1823), IV 1865 (1824-1826), V 1866 (1827-1833), VI 1881 (1834-1839), VII Paris, Pédone-Lauriel, 1888 (1840-1843) [plusieurs éditions accessibles sur Gallica et Google Books].
Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895.
Léger Abel-Nicolas, Histoire diplomatique d'Haïti, Tome premier, 1804-1859, Port-au -Prince, Imprimerie Aug. A. Héraux, 1930 [consultable sur Gallica].
Léger Jacques Nicolas, Recueil des traités et conventions de la République d'Haïti, Imprimerie de la Jeunesse, Maison Athanase Laforest, 1891 [accessible en Google Book].
Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol. 5 et 6 [consultable en Google Book].
La lecture de la presse, historique et contemporaine dans ses différentes tendances, proposée aux élèves sous forme d’extraits ou de recherche, est indispensable pour confronter les analyses et les points de vue, tout en proposant, à chaque fois, aux élèves de rédiger une fiche d’identification des auteurs et des supports de presse. Parmi de nombreux autres exemples :
Dalembert Louis-Philippe, « Haïti, la dette originelle », Libération, 25 mars 2010 [https://www.liberation.fr/planete/2010/03/25/haitila-dette-originelle_617159/].
Denis Watson, « Série de dettes publiques contractées par Haïti sur le marché intérieur et extérieur au XIXe siècle (1825-1911). (De la double dette de l’indépendance aux emprunts de la Consolidation et pour la création de la Banque Nationale de la République d’Haïti) », Le Nouvelliste, 6 juin 2022, [https://lenouvelliste.com/article/236244/serie-de-dettes-publiques-contractees-par-haiti-sur-le-marche-interieur-et-exterieur-au-xixe-siecle-1825-1911].
Louis Etienne Islam, « L’ordonnance royale de Charles X représente beaucoup plus qu’une dette morale », Le Nouvelliste, 19 mai 2015 [https://lenouvelliste.com/article/144883/lordonnance-royale-de-charles-x-represente-beaucoup-plus-quune-dette-morale].
Louis Etienne Islam, « Les conséquences néfastes de l’ordonnance de Charles X », Le Nouvelliste, 17 juin 2017 [https://lenouvelliste.com/m/public/index.php/article/145979/les-consequences-nefastes-de-lordonnance-de-charles-x].
Tontongi Eddy Toussaint, « La France doit restituer à Haïti la rançon de l’indemnité », AlterPresse, 24 aout 2010 [https://www.alterpresse.org/spip.php?article9913].
Le dossier « Ransom », en anglais, créole et français du New York Times publié en mai-juin 2022 [https://www.nytimes.com/fr/2022/05/20/world/haiti-france-dette-reparations.html] a donné lieu à de nombreuses réactions dans différents journaux, voir notamment, entre de nombreux autres :
Anonyme, « Les articles du New York Times et leurs auteurs », Le Nouvelliste, 26 mai 2022 [https://lenouvelliste.com/article/236020/les-articles-du-new-york-times-et-leurs-auteurs].
« Au minimum, la France devrait rembourser plus de 28 milliards de dollars américains à Haïti aujourd’hui », soutient le célèbre économiste français Thomas Piketty, Le Nouvelliste, 20 janvier 2020 [https://lenouvelliste.com/article/211316/au-minimum-la-france-devrait-rembourser-plus-de-28-milliards-de-dollars-americains-a-haiti-aujourdhui-soutient-le-celebre-economiste-francais-thomas-piketty].
« Dette de l’indépendance : 28 milliards de dollars à rembourser par la France à Haïti ? ! », , Le Nouvelliste, 30 janvier 2020 [https://lenouvelliste.com/article/211786/dette-de-lindependance-28-milliards-de-dollars-a-rembourser-par-la-france-a-haiti].
Frédéric Thomas, « Haïti : les dettes de la France », Libération, 25 mai 2022 [https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/haiti-les-dettes-de-la-france-20220525_LCE7KBSPKFASZE3DU5W2RQEE3I/].
Lalime Thomas, « La dette de l’indépendance a plombé le décollage économique d’Haïti », Le Nouvelliste, 2 août 2022 [https://lenouvelliste.com/article/234086/la-dette-de-lindependance-a-plombe-le-decollage-economique-dhaiti].
Ledan fils Jean, « La descente aux enfers, L’Ordonnance de 1825 », Le Nouvelliste, 11 août 2022 [https://lenouvelliste.com/article/237515/lordonnance-de-1825].
Slavicek Marie, « Haïti : comment la France a obligé son ancienne colonie à lui verser des indemnités compensatoires », Le Monde, 23 mai 2022 [https://www.lemonde.fr/international/article/2022/05/23/haiti-comment-la-france-a-oblige-son-ancienne-colonie-a-lui-verser-des-indemnites-compensatoires_6127378_3210.html].
Presse historique :
Gazette nationale ou le Moniteur universel, 12 août 1825 : « Ministère de la Marine et des Colonies. M. le baron de Mackau, capitaine de vaisseau, est partie de Rochefort le 4 mai dernier, sur la frégate La Circé, avec l'ordre de se rendre à Saint-Domingue, et d'y porter l'ordonnance ci-après : Ordonnance du roi [Charles X]. Paris, le 17 avril 1825 » [consultable sur Gallica : https://www.retronews.fr/journal/gazette-nationale-ou-le-moniteur-universel/12-aout-1825/149/1276817/1].
Divers comités et associations abordent la question, souvent dans un engagement citoyen et militant qui nécessitent pour les élèves une recherche et une analyse critique de leurs informations et de leurs actions, par exemple :
Duval Jérôme, « Haïti. La rançon odieuse de l’indépendance », Comité pour l’abolition des dettes illégitimes / Comité pour l’Annulation de la Dette du Tiers Monde (CADTM), 8 août 2022 [https://www.cadtm.org/La-rancon-odieuse-de-l-independance].
La question a suscité de nombreuses publications au XIXe siècle, voir par exemple :
Chancy Emmanuel, L’Indépendance nationale d’Haïti. Etude historique contenant des appréciations nouvelles, suivie d’états inédits des sommes versées dès 1838 en exécution du traité financier du 12 février et précédé d’une préface de M. Jérémie, C. Marpon et E. Flammarion Editeurs, Paris, 1884.
Dard Henri Jean Baptiste, Observations sur le droit de souveraineté de la France sur Saint-Domingue et sur les droits des colons propriétaires de cette ile, A Egron Imprimeur-Libraire, Paris, 1823, réimpression, Paris, Hachette BnF, 2018.
Droits de souveraineté de la France sur ST.-Domingue, contrat qui l’établit, violation de ce contrat, principes de compensation invoqués par les colons, Paris, Imprimerie de Dondey-Dupré, 1821 [consultable sur Gallica].
Esmangart de Feynes Claude Florimont, Nouvel avis aux colons de Saint-Domingue sur le paiement de l’indemnité, Paris, Dentu Libraire, 1836 [consultable sur Gallica].
Le Pelletier de Saint-Rémy Romuald, Saint-Domingue : étude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, [consultable sur http://www.manioc.org/].
Charolais [Louis], L'Indépendance d'Haïti et la France, Paris, E. Dentu, 1861 [téléchargeable sur Gallica].
T.-A. M., Le traité d'Haïti vu à Londres par le commerce et les journaux anglais de l'opposition, ou Lettre d'un français résidant à Londres, sur l'impression qu'a faite dans cette ville l'ordonnance royale du 17 avril 1825 ... contenant en outre quelques observations sur la loi des douanes d'Haïti, Paris, La Librairie du Commerce, 1825 [consultable sur Gallica].
Voir aussi :
Brière Jean-François, « L'Abbé Grégoire et la Révolution Haïtienne », Journal of Haitian Studies, University of California, Santa Barbara, Vol. 8, No. 2, pp. 44-51.
Chatelain Joseph, La Banque Nationale. Son histoire, ses problèmes, Collection du Tricinquantenaire, Imprimerie Held SA, Lausanne / Port-au-Prince, 1954, notamment les pages 159-164.
Desquiron Jean, Haïti a la une, une anthologie de la presse haïtienne de 1724 à 1934, Port-au-Prince, Imprimeur II, 1993.
Gouraige Ghislain, L’Indépendance d’Haïti devant la France, Imprimerie de l’Etat, Port-au-Prince, 1955.
Hector Michel, « Mouvements populaires et sortie de crise (XIXe - XXe siècles) », Pouvoirs dans la Caraïbe, 10 | 1998, [http://journals.openedition.org/plc/557].
Joachim Benoît, Les racines du sous-développement en Haïti, Port-au-Prince, Éditions Henri Deschamps, 1979.
Joachim Benoît, « L'indemnité coloniale de Saint-Domingue et la question des rapatriés », Revue Historique, T. 246, Fasc. 2 (500), octobre-décembre 1971), pp. 359-376 [https://www.jstor.org/stable/40952911].
Péan Leslie J. R., Haïti, économie politique de la corruption. De Saint-Domingue à Haïti 1791-1870, Paris, Maisonneuve & Larose, 2003.
Pierre-Charles Gérard, L’Economie haïtienne et sa voie de développement, Port-au-Prince, Editions Henri Deschamps, 1993.
Modalités d’évaluation :
Evaluation initiale (diagnostique) :
La séquence nécessite un minimum de connaissances sur la colonisation française de Saint-Domingue (notamment sur l’économie coloniale), les révolutions française et haïtienne, la création de l’État et de la nation haïtiens, proposer aux élèves une fiche avec quelques dates à compléter (voir Annexe 1).
Evaluation finale (bilan) et critères/indicateurs de réussite :
Autoévaluation (voir les fiches d’autoévaluation dans le Guide du professeur, téléchargeables sur Canopé).
Evaluation finale sur :
La construction progressive de la chronologie de la question de 1814 à nos jours : événements les plus importants, textes, articles de presse… ainsi que la présentation de la chronologie sur papier ou sur écran (hypertexte avec liens cliquables sur les événements, les documents, les notices biographiques).
Le dossier de presse : présentation et choix des extraits, mise en page.
Prolongements éventuels
Le statut colonial de Saint-Domingue et l’indépendance d’Haïti ont suscité de nombreux débats et ont été l’objet de tractations internationales. Dans une démarche individuelle ou collective d’analyse de documents, avec un rendu sous forme d’exposés ou d’écrits (type article d’un dictionnaire ou page d’un magazine, papier ou écran, présentant le document) brefs, on pourra proposer des études sur les abolitions de la traite dans le cadre du traité de Vienne : Act Prohibiting Importation of Slaves 2 mars 1807 (États-Unis d’Amérique) ; Slave Trade Act 25 mars 1807 (Royaume Uni) ; Traité de Stockholm 3 mars 1813 (Royaume Uni / Suède) ; Convention de Londres 13 août 1814 (Royaume Uni / Pays-Bas) ; Déclaration du 8 février 1815 (Congrès de Vienne) ; Décret impérial 29 mars 1815 (France). Tous ces textes sont disponibles sur Internet.
La question de l’indemnisation des colons n’est pas traitée dans cette séquence, elle pourra donner lieu à la rédaction par les élèves de courtes fiches de synthèse ou de courts exposés, en les guidant dans une recherche d’informations dans les ouvrages de l’époque (voir les « Supports).
En lien avec les séquences d’histoire sur le XIXe siècle, réaliser des fiches biographiques des principaux protagonistes haïtiens et français : dirigeants politiques, chargés de mission.
La période a vu la création de la gourde papier (25 septembre 1826), de la Banque Nationale (1874, 30 juillet 1880), de la Banque Nationale de la République d’Haïti (29 août 1910). Proposer aux élèves d’étudier les moyens monétaires circulant en Haïti (pièces : flan, poids, métal, dimension, valeur, inscriptions, symboles… ; et billets : banque, imprimeur, valeur, graphisme…) et à l’international. De nombreux site de collectionneurs et de numismates proposent des reproductions, voir aussi Lissade Joseph Guerdy, Guide de numismatique haïtienne : les monnaies métalliques, Port-au-Prince, Banque de la République d'Haïti, 2013.
Proposer une étude du Code rural de 1826, voir :
Code rural de Boyer 1826, avec les commentaires de Roger petit-Frère, Jean Vandal et Georges E. Werleigh, Port-au-Prince, Coédition Archives nationales d'Haïti / Maison H. Deschamps, 1992 [consultable sur Google Books].
Hector Michel, « Problèmes du passage à la société postesclavagiste et postcoloniale (1791-1793/1820-1826) », in Hector Michel, Hurbon Laënnec (dir.), Genèse de l'État haïtien (1804-1859), Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2009, pp. 93-117 [https://books.openedition.org/editionsmsh/9744].
Proposer une recherche et une étude des principaux événements des années 1840 : tremblement de terre au Cap Haïtien (mai 1842), incendie de Port-au-Prince (janvier 1843), révolution de 1843 et « abdication » de Jean-Pierre Boyer, révolte des « piquets » (famille Salomon, Jean-Jacques Acaau, Dugé Zamor, Jean Claude) et « politique de doublure ».
En lien avec le cours de français, proposer la lecture suivie ou la lecture et l’analyse de quelques extraits de Combats de Néhémy Pierre-Dahomey (Paris, Seuil, 2021), dont l’action se déroule en 1842.
Différenciation et adaptation aux élèves à besoins éducatifs particuliers
Compte tenu de la difficulté de la question et de ses implications dans le présent, le professeur pourra mettre en place une différenciation pour les élèves à besoins éducatifs particuliers d’une part en adaptant les séances dans une approche narrative (par exemple en s’appuyant sur des extraits de Thomas Madiou), d’autre part sur des extraits d’articles de presse, voire des extraits d’interviews, qui résument la question (voir les « Supports »).
Mise au point pour l’enseignant
La séquence repose sur une démarche historique régressive, partant d’un questionnement présent sur les rapports entre la dette de l’indépendance, la reconnaissance internationale et le développement d’Haïti, réactualisé par le discours de Jean-Bertrand Aristide le 7 avril 2003 à l’occasion du bicentenaire de la mort de Toussaint Louverture réclamant « Restitution et Réparation » et par la publication du dossier du New York Times en mai-juin 2022, qui a été répercutée et analysée dans les médias de nombreux pays et occasionné de multiples et diverses prises de position au niveau national et international. La démarche a pour objectif, tout en approfondissant les compétences de lecture critique et de questionnement des médias, de les utiliser comme source d’histoire en les confrontant aux documents d’époque et aux différents écrits publiés depuis. La séquence, fondée sur la formulation d’hypothèses et l’élaboration d’une problématique sur les causalités complexes entre l’imposition de la dette, les emprunts et le développement d’Haïti dans les deux derniers siècles, est donc conçue comme un aller-retour permanent entre le présent et le passé : le présent pour questionner le passé et le passé pour questionner le présent. Pour simplifier la démarche, l’accent est mis sur l’histoire d’Haïti. L’indemnisation des anciens colons, la chaine économique de l’exploitation coloniale dans la métropole, avec tous les débats éthiques et économiques qui les accompagnent, ne sont abordées que dans les « Prolongements éventuels ».
La séquence pose la question historique de la liberté et du droit à l’autodétermination de la personne et des groupes humains, de l’exploitation des individus et des nations, des inégalités de développement, de la place et du rôle de la colonisation et des formes du (néo)colonialisme jusqu’aux temps présents. Elle pose aussi la question de la responsabilité historique et l’engagement présent des États ouvrant sur tous les débats contemporains sur les indemnisations, les compensations, les réparations. Les questions abordées dans cette séquence ont un fort impact sur les affects, les mémoires individuelles et collectives, il s’agit donc de guider les élèves dans une approche scientifique qui a suscité et suscite encore de nombreux débats entre historiens, et qui se confronte en permanence aux débats et aux faits de société où le racisme, la domination et l’exploitation par la violence sont omniprésents. La séquence, destinée à faire comprendre aux élèves que l’écriture de l’histoire est fondée sur la formulation d’hypothèses questionnant des traces, des indices et des sources de diverses origines (ici notamment la presse) est donc aussi à exploiter en lien avec les séquences d’éducation à la citoyenneté qui questionnent ces problèmes.
L’exploitation néocoloniale produit aussi la corruption, tant chez le dominant que chez le dominé et tend à éloigner les élites de la majorité de la population tenue par l’ignorance et la répression. Il s’agit donc de guider les élèves dans un questionnement et une interprétation des faits à différentes échelles, du local à l’international et au global, par la recherche et l’étude critique des médias (journaux, télévision, réseaux sociaux…), des ouvrages historiques et littéraires, des collections des musées et de leur scénographie, des œuvres d’art et de tous les lieux et objets de mémoire et de commémoration, notamment ceux qui se trouvent dans l’environnement proche.
La lecture de la presse au quotidien, et aussi de la presse historique, est une des bases de cette séquence pour conduire avec les élèves un questionnement au quotidien des silences de l’histoire tout autant qu’une interrogation sur la situation contemporaine d’Haïti : faiblesse des infrastructures et du développement économique, dépendance financière, instabilité politique, occupation (1915-1934, voir la séquence téléchargeable sur Canopé) et interventions étrangères (MINUSTAH établie le 1er juin 2004 par la résolution 1542 du Conseil de sécurité de l'ONU).
Séance 1. La dette et le développement d’Haïti, un débat contemporain ?⚓
Supports et matériel
Pour un résumé des faits, voir :
Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001.
Blancpain François, Gainot Bernard, « Les négociations des traités de 1838 », La Révolution française, 16 | 2019, [http://journals.openedition.org/lrf/2757], ainsi que Blancpain François, « L’ordonnance de 1825 et la question de l’indemnité » et Gaillard-Pourchet Gusti Klara, « Aspects politiques et commerciaux de l’indemnisation haïtienne », in Bénot Yves, Dorigny Marcel (dir.), Rétablissement de l’esclavage dans les colonies françaises. Aux origines de Haïti, Paris, Maisonneuve et Larose, 2003, pp. 221-229 et 231-237.
Eugène Itazienne, « La normalisation des relations franco-haïtiennes (1825-1838) », pp. 139-154 ; Blancpain François, « Note sur les ‘dettes’ de l'esclavage : le cas de l'indemnité payée par Haïti (1825-1883) », pp. 241-245, In Outre-mers, tome 90, n° 340-341, 2e semestre 2003, numéro spécial Haïti Première République Noire, Marcel Dorigny (dir.). Voir aussi les annexes : L'ordonnance de Charles X du 17 avril 1825, p. 249 ; Mode d'évaluation du montant de l'indemnité fixée par l'ordonnance de 1825, pp. 249-250 ; Proclamation du président Boyer acceptant l'ordonnance française, p. 250 ; Les deux traités de 1838, pp. 251-252 ; Schoelcher et la dette de l'indépendance, pp. 252-254 [https://www.persee.fr/issue/outre_1631-0438_2003_num_90_340].
Brière Jean-François, « La France et la reconnaissance de l'indépendance haïtienne : le débat sur l'ordonnance de 1825 », French colonial history, 2004, vol. 5, pp. 125-138 [consultable sur JSTOR].
Pour les extraits de journaux, voir les Annexes.
Pour la démarche sur les esquisses biographiques, le professeur pourra se reporter à la séquence du secondaire « Faire la biographie d’un personnage historique : Toussaint Louverture » (disponible sur Canopé).
Déroulement de la séance
Etape | Durée | Ce que fait l’enseignant | Ce que fait l’élève |
---|---|---|---|
Temps 1 La question de la dette, un débat contemporain (1) ? | 10 min lors d’un cours précédent et variable | En amont, une quinzaine de jours avant le cours si c’est possible, proposer aux élèves, individuellement ou en petits groupes, de :
| Avant le cours :
|
Temps 2 La question de la dette, un débat contemporain (2) ? | 10 à 15 min | Guider la présentation des chronologies pour obtenir au tableau une chronologie de référence qui sera peu à peu complétée. Afficher les recherches de titres de journaux pour réaliser sous forme de graphe le champ lexical de l’histoire de la dette et des débats contemporains. Éventuellement, faire relever les noms des protagonistes et guider la réalisation d’une courte notice biographique qui sera complétée par la suite. | Participer à la construction collective de la chronologie. La recopier sur le cahier en laissant la place nécessaire pour la compléter au fur et à mesure des séances de cette séquence et des séquences ultérieures. Relever et noter tous les mots qui se rapportent à la dette dans les titres des journaux, en proposer un classement dont chaque partition est résumée en une phrase sous forme d’hypothèse. Éventuellement, relever tous les noms des personnages cités et, par une recherche sur Internet, réaliser une courte biographie de chacun d’eux (deux phrase maximum). |
Temps 3 La question de la dette, une histoire contemporaine | 15 à 20 min | Interroger et faire réfléchir les élèves sur la date symbolique du 7 avril 2003. Un tiers de la classe disposant du discours de Jean-Bertrand Aristide du lundi 7 avril 2003, un autre tiers de l’extrait du Nouvelliste ou un autre journal haïtien, et le troisième tiers de l’extrait du Monde ou de Libération (voir les Annexes), guider, en petits groupes, la lecture et l’analyse critique des documents. |
|
Temps 4 Esquisse des notices biographiques | 5 à 10 min | Guider les élèves dans une brève recherche destinée à esquisser la notice biographique de Jean-Bertrand Aristide et des autres personnages cités qui seront complétées lors des séances sur l’histoire contemporaine en fin de 9e année. | Esquisser – si possible sur écran (voir la démarche dans la séquence de 8e année sur « La Révolution et les luttes pour l’indépendance » téléchargeable sur Canopé) la notice biographique de Jean-Bertrand Aristide (dates des mandats présidentiels et des coups d’État, de l’exil), ainsi que des autres personnages cités. |
Temps 5 | 15 à 20 min | Distribuer à chaque groupe, des extraits différents du dossier du New York Times (dans un cadre interdisciplinaire, ces extraits pourront être proposés en créole et en anglo-américain). En guider la lecture et l’analyse, comme précédemment. Faire compléter et rédiger le questionnement (qui ? quoi ? où ? quand ? comment ? pourquoi ?), la problématique et le corps d’hypothèses (la dette, la « double dette » et le développement d’Haïti). |
|
Temps 6 | 10 mn pour la présentation et variable | À partir des lectures et des analyses précédentes, proposer et mettre en place une recherche et son suivi pour la réalisation, qui sera complétée tout au long de l’année :
| Comprendre et s’approprier la proposition de recherche et de réalisation, tout au long de l’année, d’un dossier de presse, de notices biographiques et d’une chronologie. |
Production attendue
Construire et rédiger un questionnement qui servira de base aux recherches et à la réalisation d’un dossier de presse, d’une chronologie et de notices biographiques.
Trace écrite pour l’élève
Chronologie.
Analyse critique d’articles et synthèse.
Glossaire historique.
Évaluation et régulation
L’évaluation se fait sur le suivi en continu des recherches des élèves et de la réalisation, les choix documentaires retenus et l’organisation (présentation critique des documents, reproduction et droits, mise en page papier ou écran).
Éléments de remédiation
Reprise et analyse en commun d’extraits du dossier du New York Times.
Remédiation individuelle (et éventuellement collective) sur le suivi annuel des dossiers : chronologie, dossier de presse, notices biographiques.
Séance 2. La dette de l’indépendance, négociation et imposition⚓
Supports et matériel
Le dossier « Ransom », en anglais, créole et français du New York Times publié en mai-juin 2022 [https://www.nytimes.com/fr/2022/05/20/world/haiti-france-dette-reparations.html] et quelques réactions dans différents journaux, par exemple :
Anonyme, « Les articles du New York Times et leurs auteurs », Le Nouvelliste, 26 mai 2022 [https://lenouvelliste.com/article/236020/les-articles-du-new-york-times-et-leurs-auteurs].
« Au minimum, la France devrait rembourser plus de 28 milliards de dollars américains à Haïti aujourd’hui », soutient le célèbre économiste français Thomas Piketty, Le Nouvelliste, 20 janvier 2020 [https://lenouvelliste.com/article/211316/au-minimum-la-france-devrait-rembourser-plus-de-28-milliards-de-dollars-americains-a-haiti-aujourdhui-soutient-le-celebre-economiste-francais-thomas-piketty].
« Dette de l’indépendance : 28 milliards de dollars à rembourser par la France à Haïti ? ! », , Le Nouvelliste, 30 janvier 2020 [https://lenouvelliste.com/article/211786/dette-de-lindependance-28-milliards-de-dollars-a-rembourser-par-la-france-a-haiti].
Frédéric Thomas, « Haïti : les dettes de la France », Libération, 25 mai 2022 [https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/haiti-les-dettes-de-la-france-20220525_LCE7KBSPKFASZE3DU5W2RQEE3I/].
Ledan fils Jean, « La descente aux enfers, L’Ordonnance de 1825 », Le Nouvelliste, 11 août 2022 [https://lenouvelliste.com/article/237515/lordonnance-de-1825].
Slavicek Marie, « Haïti : comment la France a obligé son ancienne colonie à lui verser des indemnités compensatoires », Le Monde, 23 mai 2022 [https://www.lemonde.fr/international/article/2022/05/23/haiti-comment-la-france-a-oblige-son-ancienne-colonie-a-lui-verser-des-indemnites-compensatoires_6127378_3210.html].
Digithèque de matériaux juridiques et politiques : Domaine des Constitutions de Haïti [https://mjp.univ-perp.fr/constit/ht.htm] ; domaine des constitutions françaises [https://mjp.univ-perp.fr/france/france.htm].
Janvier Louis-Joseph, Les constitutions d'Haïti (1801-1885), Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1886 [consultable sur Gallica].
Linstant de Pradine, Recueil général des lois & actes du Gouvernement d'Haïti depuis la proclamation de son indépendance jusqu'à nos jours, Paris, Auguste Durand, Tome I 1860 (1804-1808), II (1809-1817), III (1818-1823), IV 1865 (1824-1826), V 1866 (1827-1833), VI 1881 (1834-1839), VII Paris, Pédone-Lauriel, 1888 (1840-1843) [plusieurs éditions accessibles sur Gallica et Google Books].
Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895.
Léger Abel-Nicolas, Histoire diplomatique d'Haïti, Tome premier, 1804-1859, Port-au -Prince, Imprimerie Aug. A. Héraux, 1930 [consultable sur Gallica].
Léger Jacques Nicolas, Recueil des traités et conventions de la République d'Haïti, Imprimerie de la Jeunesse, Maison Athanase Laforest, 1891 [accessible en Google Book].
Le Pelletier de Saint-Rémy Romuald, Saint-Domingue : étude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, [consultable sur http://www.manioc.org/].
Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.5 [consultable en Google Book].
Déroulement de la séance
Etape | Durée | Ce que fait l’enseignant | Ce que fait l’élève |
---|---|---|---|
Temps 1 Le contexte intérieur | 15 à 25 min | Selon les possibilités, en utilisant : - Les constitutions d'Haïti de Louis-Joseph Janvier ou la Digithèque de matériaux juridiques et politiques, - des extraits en annexe (Annexe 3). Faire relever collectivement, par petits groupes ou individuellement, tous les articles qui traitent de la propriété du sol, de la production et du commerce dans les constitutions de 1805, 1806, 1807, 1811 et 1816. Après avoir fait inscrire les dates des constitutions dans la chronologie, guider la formulation d’hypothèses sur les relations entre Haïti et la France, entre Haïti et les autres États. En s’appuyant sur les séquences de 8e (« La Révolution haïtienne (1791-1806) ») et de 9e année (« La formation de l’État haïtien 1804 – 1843 »), faire dresser collectivement par les élèves un état de la situation et de son évolution en Haïti 1806 à 1825, au besoin en revenant sur le statut colonial de Saint-Domingue (voir les « Prolongements éventuels »). |
|
Temps 2 Le contexte extérieur (1) | 10 à 15 min |
|
|
Temps 2 bis facultatif Le contexte extérieur (2) | Variable, temps facultatif en fonction du niveau de la classe et de la possibilité d’un temps de travail interdisciplinaire hors de la classe | Dans une approche interdisciplinaire avec le cours d’anglais, soit par petits groupes soit en collectif, proposer la lecture de quelques courts extraits de la lettre du 8 septembre 1818 de James Stephen à Lord Castlereagh (Annexe 6.1). Faire relever les raisons évoquées pour éviter le retour des français à Saint-Domingue / Haïti. | Lire les extraits et relever les raisons évoquées pour éviter le retour des français à Saint-Domingue / Haïti. |
Temps 3 1814-1825. Un temps de négociations | 10 à 15 min | Proposer à la lecture, de préférence en petits groupes et si possible sur écran, sinon en reproduction papier, de courts extraits de la documentation en annexe 7. Compléter collectivement la chronologie précédente en y ajoutant les négociations entre la France et Haïti entre 1814 et 1825. En complément, proposer de rechercher les noms des principaux protagonistes pour en établir une courte notice biographique (maximum 5 lignes). | À l’aide des documents compléter la chronologie précédente. Facultatif : rechercher les noms des principaux protagonistes et en établir une courte notice biographique (maximum 5 lignes). |
Temps 4 La question de l’indemnité du point de vue des colons (facultatif voir les « prolongements éventuels) | Facultatif et variable | (Facultatif voir les « prolongements éventuels) Guider la rédaction par les élèves de courtes fiches de synthèse ou de courts exposés sur les indemnités du point de vue des colons, en les guidant dans une recherche d’informations dans les ouvrages de l’époque. | (Facultatif voir les « prolongements éventuels) Rédiger de courtes synthèses ou présenter de courts exposés. |
Temps 5 Des regards d’historiens au XIXe siècle | Variable | Si c’est possible, proposer pour la séance suivante une recherche les deux historiens, Thomas Madiou et Beaubrun Ardouin (Annexe 11) et la rédaction d’une fiche bibliographique et bibliographique, sinon les présenter rapidement lors de la séance suivante au début du temps 3. | Mener une recherche sur les deux historiens, Thomas Madiou et Beaubrun Ardouin et rédiger une courte notice biographique et bibliographique. |
Production attendue
Recherche et collecte d’articles des constitutions de 1805, 1806, 1807, 1811 et 1816.
Chronologie.
Synthèses ou exposés.
Trace écrite pour l’élève
Articles des constitutions.
Chronologie.
Synthèses rédigées par les élèves.
Glossaire historique.
Évaluation et régulation
(Auto)évaluation de la chronologie et des synthèses.
Éléments de remédiation
Reprise orale collective à partir de la lecture d’extraits du dossier du New York Times.
Séance 3. La dette de l’indépendance, de la dette à « la double dette » (1)⚓
Supports et matériel
Digithèque de matériaux juridiques et politiques : Domaine des Constitutions de Haïti [https://mjp.univ-perp.fr/constit/ht.htm] ; domaine des constitutions françaises [https://mjp.univ-perp.fr/france/france.htm].
Janvier Louis-Joseph, Les constitutions d'Haïti (1801-1885), Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1886 [consultable sur Gallica].
Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895.
Léger Abel-Nicolas, Histoire diplomatique d'Haïti, Tome premier, 1804-1859, Port-au -Prince, Imprimerie Aug. A. Héraux, 1930 [consultable sur Gallica].
Léger Jacques Nicolas, Recueil des traités et conventions de la République d'Haïti, Imprimerie de la Jeunesse, Maison Athanase Laforest, 1891 [accessible en Google Book].
Le Pelletier de Saint-Rémy Romuald, Saint-Domingue : étude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, [consultable sur http://www.manioc.org/].
Linstant de Pradine, Recueil général des lois & actes du Gouvernement d'Haïti depuis la proclamation de son indépendance jusqu'à nos jours, Paris, Auguste Durand, Tome I 1860 (1804-1808), II (1809-1817), III (1818-1823), IV 1865 (1824-1826), V 1866 (1827-1833), VI 1881 (1834-1839), VII Paris, Pédone-Lauriel, 1888 (1840-1843) [plusieurs éditions accessibles sur Gallica et Google Books].
Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.5 [consultable en Google Book].
Denis Watson, « Série de dettes publiques contractées par Haïti sur le marché intérieur et extérieur au XIXe siècle (1825-1911). (De la double dette de l’indépendance aux emprunts de la Consolidation et pour la création de la Banque Nationale de la République d’Haïti) », Le Nouvelliste, 6 juin 2022, [https://lenouvelliste.com/article/236244/serie-de-dettes-publiques-contractees-par-haiti-sur-le-marche-interieur-et-exterieur-au-xixe-siecle-1825-1911].
Louis Etienne Islam, « L’ordonnance royale de Charles X représente beaucoup plus qu’une dette morale» , Le Nouvelliste, 19 mai 2015 [https://lenouvelliste.com/article/144883/lordonnance-royale-de-charles-x-represente-beaucoup-plus-quune-dette-morale].
Louis Etienne Islam, « Les conséquences néfastes de l’ordonnance de Charles X », Le Nouvelliste, 17 juin 2017 [https://lenouvelliste.com/m/public/index.php/article/145979/les-consequences-nefastes-de-lordonnance-de-charles-x].
Déroulement de la séance
Etape | Durée | Ce que fait l’enseignant | Ce que fait l’élève |
---|---|---|---|
Temps 1 L'ordonnance de Charles X : une imposition hors du droit international | 15 à 20 min |
|
|
Temps 2 L'ordonnance de Charles X : une acceptation sous contrainte | 15 à 20 min | Après avoir questionné les élèves sur les différences de date, selon la même démarche collective, guider l’analyse de l’acceptation sous contrainte, la lecture et l’analyse de la Proclamation du président Jean-Pierre Boyer du 11 juillet 1825 (Annexe 8) |
|
Temps 3 L'ordonnance de Charles X : des réactions diverses | 15 à 20 | Proposez la lecture en petits groupes des extraits des deux historiens Thomas Madiou et Beaubrun Ardouin (Annexe 11) et demander la rédaction d’un court résumé sur les réactions dans la population à l’annonce de l’acceptation de l’ordonnance. |
|
Temps 4 Payer la dette : les emprunts | 10 mn et variable | Proposer pour la séance suivante la lecture des articles ou d’extraits des articles du Nouvelliste en demandant de relever :
| Relever dans les articles du Nouvelliste :
|
Production attendue
Analyse linguistique et résumé d’articles de lois.
Analyse d’articles de presse.
Trace écrite pour l’élève
Définitions dans le glossaire historique.
Chronologie.
Analyse d’articles de presse.
Évaluation et régulation
(Auto)évaluation de la chronologie, des résumés et des analyses d’articles de presse.
Éléments de remédiation
Reprise orale collective l’ordonnance de Charles X et de de la Proclamation du président Jean-Pierre Boyer.
Séance 4. La dette de l’indépendance, de la dette à « la double dette » (2)⚓
Supports et matériel
Digithèque de matériaux juridiques et politiques : Domaine des Constitutions de Haïti [https://mjp.univ-perp.fr/constit/ht.htm] ; domaine des constitutions françaises [https://mjp.univ-perp.fr/france/france.htm].
Janvier Louis-Joseph, Les constitutions d'Haïti (1801-1885), Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1886 [consultable sur Gallica].
Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895.
Léger Abel-Nicolas, Histoire diplomatique d'Haïti, Tome premier, 1804-1859, Port-au -Prince, Imprimerie Aug. A. Héraux, 1930 [consultable sur Gallica].
Léger Jacques Nicolas, Recueil des traités et conventions de la République d'Haïti, Imprimerie de la Jeunesse, Maison Athanase Laforest, 1891 [accessible en Google Book].
Le Pelletier de Saint-Rémy Romuald, Saint-Domingue : étude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, [consultable sur http://www.manioc.org/].
Linstant de Pradine, Recueil général des lois & actes du Gouvernement d'Haïti depuis la proclamation de son indépendance jusqu'à nos jours, Paris, Auguste Durand, Tome I 1860 (1804-1808), II (1809-1817), III (1818-1823), IV 1865 (1824-1826), V 1866 (1827-1833), VI 1881 (1834-1839), VII Paris, Pédone-Lauriel, 1888 (1840-1843) [plusieurs éditions accessibles sur Gallica et Google Books].
Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.5 [consultable en Google Book].
Denis Watson, « Série de dettes publiques contractées par Haïti sur le marché intérieur et extérieur au XIXe siècle (1825-1911). (De la double dette de l’indépendance aux emprunts de la Consolidation et pour la création de la Banque Nationale de la République d’Haïti) », Le Nouvelliste, 6 juin 2022, [https://lenouvelliste.com/article/236244/serie-de-dettes-publiques-contractees-par-haiti-sur-le-marche-interieur-et-exterieur-au-xixe-siecle-1825-1911].
Louis Etienne Islam, « L’ordonnance royale de Charles X représente beaucoup plus qu’une dette morale» , Le Nouvelliste, 19 mai 2015 [https://lenouvelliste.com/article/144883/lordonnance-royale-de-charles-x-represente-beaucoup-plus-quune-dette-morale].
Louis Etienne Islam, « Les conséquences néfastes de l’ordonnance de Charles X », Le Nouvelliste, 17 juin 2017 [https://lenouvelliste.com/m/public/index.php/article/145979/les-consequences-nefastes-de-lordonnance-de-charles-x].
Déroulement de la séance
Etape | Durée | Ce que fait l’enseignant | Ce que fait l’élève |
---|---|---|---|
Temps 1 De la dette à la double dette (1) | 10 min | Guider la présentation des articles du Nouvelliste et la synthèse de ceux-ci. |
|
Temps 2 De la dette à la double dette (2) | 10 à 15min | Guider la lecture collective du Convention conclue le 2 avril 1831, entre la France et Haïti pour mettre en évidence la spirale des emprunts qui va grever le développement d’Haïti jusqu’au XXe siècle. |
|
Temps 3 Négocier la dette, la souveraineté d’Haïti et sa reconnaissance internationale | 20 à 25 min | Selon la même démarche que la séance précédente, guider l’analyse des traités de 1838, puis comparer le vocabulaire avec l’ordonnance de 1825 : ordonnance / traité, habitants actuels de la partie française de l'île de St. Domingue / plénipotentiaires [aux] pleins pouvoirs respectifs, partie française de Saint-Domingue / République d'Haïti, indépendance pleine et entière de leur gouvernement / État libre, souverain et indépendant, citoyens des deux États… |
|
Temps 4 « La double dette » | Variable | Au cours des séquences suivantes, poursuivre l’étude de la dette : cours du café ; évolution du taux de la gourde par rapport au dollar ; emprunt « Domingue du 9 septembre ; création de la banque nationale (1874), de la Banque Nationale d’Haïti (1880), de la Banque Nationale de la République d’Haïti ((29 août 1910) ; emprunt du 8 mars 1875 ; paiement du solde de la dette de l’indépendance (décembre 1883) ; Convention franco-haïtienne de révision du contrat d’emprunt de 1875 (2 septembre 1885) ; emprunt de 1895-1896 ; lois de consolidation (26 avril et 1er août 1900) ; loi de remboursement des dettes de la consolidation (28 octobre 1910) ; emprunts de 1911 et 1913 ; lois de retrait du papier monnaie (23 juillet 1912 et 26 août 1913) ; loi transférant la BNRH à la National City Bank (31 juillet 1922) ; remboursement par anticipation du solde des emprunts de 1875, 1896 et 1910. |
|
Temps 5 « La double dette » et le développement d’Haïti (1) | Variable | Proposer un suivi d’actualité sur la question de la dette et du développement d’Haïti dans quelques journaux haïtiens et étrangers pour constituer au long de l’année, en liens avec les séquences d’histoire sur le XIXe, le XXe et le XXIe siècles. Guider la collecte des articles et les recherches pour les documenter. |
|
Temps 6 « La double dette » et le développement d’Haïti (2) | Variable | Organiser la présentation orale des dossiers de presse, suivie d’un débat sur la dette et le développement d’Haïti en aidant au préalable les élèves à construire leur argumentaire. Proposer la relecture collective du dossier du New York Times. |
|
Production attendue
Définitions dans le glossaire historique.
Chronologie.
Réalisation d’un dossier de presse.
Trace écrite pour l’élève
Définitions dans le glossaire historique.
Chronologie.
Présentation des articles du dossier de presse.
Évaluation et régulation
(Auto)évaluation de la chronologie et du dossier de presse.
Éléments de remédiation
Etude collective orale d’un article de presse.
Annexes⚓
Annexe 1. Évaluation diagnostique
Nom : | |
Prénom : |
Compléter le tableau en précisant, en une phrase ou deux, rédigées, les événements auxquels renvoient ces dates.
1492 |
|
1664 |
|
1685 |
|
1697 |
|
1793 |
|
1794 : 16 pluviôse an II / 4 février |
|
1795 |
|
1798 : 31 août |
|
1802 : 7 juin |
|
1803 : 7 avril |
|
1803 : 18 novembre |
|
1804 : 1er janvier |
|
1805 |
|
1806 : 17 octobre |
|
1807 |
|
1811 |
|
1816 : 2 juin, An XIII de l’indépendance |
|
1818 : 28 mars |
|
1820 : 8 octobre |
|
Annexes 2. Extraits du Nouvelliste et du Monde sur le discours du président Jean-Bertrand Aristide du 7 avril 2003
Annexe 2.1. Jean-Bertrand Aristide « Discours du Président de la République, à l'occasion de la Cérémonie commémorative du Bicentenaire de la mort de Toussaint Louverture »
Musée du Panthéon National, le 7 avril 2003 [http://www.palaisnational.info/], Le Nouvelliste, N° 36660, Mercredi 9 avril 2003, Actualité nationale, pp. 23-24. Le discours, ainsi qu’un certain nombre de documents sur la dette, est publié dans le Fascicule d’information sur l’ouverture du dossier de la restitution et des réparations à la République d’Haïti, Mouvement international pour les réparations – Global Afrikan Congress / France, décembre 2003 et disponible sur la plateforme Yumpu [https://www.yumpu.com/fr/document/view/8855902/non-a-la-recolonisation-occidentale-wasadugu].
DISCOURS DE SON EXCELLENCE
JEAN-BERTRAND ARISTIDE, PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE,
à l’occasion de la cérémonie commémorative du bicentenaire de la mort de Toussaint Louverture
Musée du Panthéon National, le 7 avril 2003
Distingués Membres du Cabinet Ministériel,
Excellence, Monsieur l'ancien Premier ministre Jacques-Édouard Alexis,
Honorable président du Sénat et Honorables sénateurs de la République,
Honorable président de la Chambre des députés et Honorables députés de la
République,
Monsieur le président de la Cour de Cassation,
Monsieur le président de la Cour Supérieure des Comptes,
Distingués maires de Port-au-Prince,
Excellence, Monsieur le Nonce Apostolique,
Distingués membres du Corps diplomatique,
Distingués membres du Corps consulaire et des Organisations internationales,
Monsieur le directeur par Intérim de la Police,
Chers policiers,
Chères policières,
Chers compatriotes du Dixième Département,
Chers compatriotes du Cap-Haïtien et de Bréda,
Chers professeurs, étudiants, écoliers et écolières,
Chers professeurs et élèves du Lycée Toussaint Louverture,
Chers concitoyens, concitoyennes,
Mesdemoiselles, Mesdames et Messieurs,
La Première Dame et moi, que nous sommes fiers de vous saluer au Nom des
Pères de la Patrie ! Un salut spécial aux Peuples Noirs de la Caraïbe, de
l'Afrique, de notre Hémisphère et bien sûr, à notre Frère, Dany Glover, présent
non à l'écran mais en chair et os, parmi nous ce matin.
Akolad patriyotik pou nou tout
Ayisyen vanyan bò isit
Kòm nan 10è Depatman an !
Chapo pou nou ! Bravo pou nou
Ki vin bay Tousen Louvèti ochan,
ONÈ ak RESPÈ !
1803 - 2003 : 200 ans de lutte pour que règnent LIBERTE et EGALITE
Toussaint Louverture, au-delà de sa mort, le front nimbé d'une auréole de
gloire, nous guide et nous redit :
"Je suis Toussaint Louverture...
Je veux que la Liberté et l'Egalité règnent à St-Domingue.
Je travaille à les faire exister. Unissez-vous à nous."
Cette déclaration historique faite au camp Turel, le 29 août 1793, nous va droit au cœur. Tous unis à Toussaint Louverture, répondons par la déclaration du Bicentenaire, à savoir : Nous, fils et filles de Toussaint Louverture, voulons que la Liberté et l'Egalité règnent en Haïti. Par le travail et l'unité, nous y parviendrons.
Tousen pale.
Nou reponn.
Tousen kòmande.
Nou di l : avozòd !
Que le Dieu de Liberté qui a ouvert le chemin de gloire et d'honneur à Toussaint, guide la race noire vers les sommets de Liberté et d'Egalité.
Qu'un hommage solennel soit rendu au Génie de la Race, lui qui nous revient en ce 7 avril 2003 !
Acclamons-le !
Bras et portes ouverts, proclamons en chœur :
Bon Retour à Bréda ! Bon Retour à la Terre Natale !
Bon Retour Lakay ! Paske Lakay se Lakay !
Cher Toussaint,
Bò isit, jan w konstate,
Batay ou t ap mennen
Pou Libète ak Egalite a
Toujou myèl.
Plis nou sonje tribilasyon ou pase pou nou,
Plis nou jwenn fòs nan ou pou n kenbe pi rèd.
Pandan lespri w ap kominike avè n,
Otorize n wouze memwa tout moun
K ap chèche konnen w pi byen.
François Dominique Toussaint fèt Okap,
Sou bitasyon Breda ki chita nan Odikap.
Jis jounen jodi a, save yo toujou ap diskite
Sou dat nesans li. Pou kèk nan yo,
Tousen fèt 20 me 1743.
Pou kèk lòt se te nan mwa me 1745 ou 1746.
Jan nou wè a, pwoblèm batistè a la,
Depi djab te kaporal.
Dayè pou kolon yo, bèt te gen plis valè
Pase moun. Nou sonje kijan
Yon jèn esklav te touye tèt li
Paske mèt li te troke l
Pou yon bèl chyen ki te konn fè lachas anpil.
Si gen dout sou kilè Tousen fèt
Pagen diskisyon sou ki jan l fèt.
Li fèt tou piti zwit, chetif.
Se pou sa yo te rele l : Fatra baton.
Nan fè egzèsis,
Kouri cheval, monte desann,
Tousen vin tounen yon gason djanm.
Pi piti pi rèd.
Lè Tousen sele cheval li,
Gade ! Se sa nèt !
Wa anfòm tankou l, pase l, non !
Eske se bò papa l li pran ?
Petèt ! Daprè plizyè save,
Tousen se pitit pitit
Ou pitit yon wa Afriken k te rele
Gaou Guinou, alyas Ipolit.
Nan tribi oubyen gwoup papa a
Soti a, yo te konn goumen anpil.
Malerezman, yon jou papa l pèdi
Yon batay e yo vann li kòm prizonye
Ba yon kapitèn bato
Ki vinn chwe bò isit Okap,
Sou bitasyon Breda.
Donk yon mal pou yon byen.
Alòske manman Tousen mouri bonè,
Papa l mouri alaj 100 an anviwon.
Se te an 1804. Li mouri avèg.
Men l wè sa pitit gason l pat gentan wè.
Kidonk lendepandans lan.
Li kite 8 pitit ak madanm li, 5 gason, 3 fiy.
Se Tousen k te premye pitit nan fanmi an.
Kontrèman a lòt esklav yo,
Tousen te gen chans jwenn yon mèt
Ki te renmen l anpil.
Blan sa a te rele Bayon Libertat.
Msye pa t ka eksplike l kijan ki fè
Tousen te entèlijan konsa.
Angis kòve nan jaden,
Tousen te travay anndan kay Bayon.
Kòm nèg konfyans, li okipe
Tout zafè mèt li.
Tousen marye a 34 an ak Suzanne Simon.
Li pa janm bliye Man Pelaji
Ki te konn okipe l aprè lanmò manman l.
Kòm nèg ki pa engra, li peye 100 pyas
Pou fè Pelaji vi n afranchi.
Li te konsidere l kòm yon lòt manman.
Li toujou gen rekonesans pou parenn li,
Pierre Baptiste ki te montre l li ak ekri.
Pa sezi : lè sa a Tousen te gen 48 an anviwon.
Depi lè a, Tousen pa t janm neglije
Fòmasyon l. Li chèche li bon liv.
Kòm gwo liv tankou sa Abbé Raynal
Pibliye, oubyen yon kokenn liv Hilliard
Te ekri nan lane 1775 ki te rele :
"Considérations sur l'Etat présent
de la Colonie française de Saint Domingue."
Konsa, Placide, Isaac ak St-Jean,
De pitit gason Tousen, te gen chans
Aprann anpil gwo leson nan men l.
Potorik gason sa a te genyen
Yon entelijans eksepsyonèl.
Se vre, analfabèt pa bèt,
Men egzanp Tousen an san parèy !
Alphabétisé à 48 ans, instruit et intelligent, Toussaint se préparait à émerger sur la scène de St-Domingue. Comme une douce lumière tamisée d'un rideau de feuillage, son génie traversait les préparatifs du soulèvement des esclaves en août 1791.
Soulèvement contre une première phase de la globalisation génocidaire. Le dynamisme esclavagiste visait en effet le contrôle direct de nos ressources naturelles. Aujourd'hui encore, la croissance pathologique de cette globalisation, illustre la démarche s'opposant diamétralement aux pôles : LIBERTE et EGALITE.
Chers compatriotes,
Chers amis de Toussaint Louverture,
Au seuil de ce nouveau millénaire, jamais, les inégalités mondiales n'ont été si profondes :
Les 4/5 des habitants du monde ne consomment qu'1/5 de l'ensemble des ressources.
Les revenus de 1% de la population mondiale équivalent à ceux des 2.7 milliards les plus pauvres.
Le paludisme tue un enfant toutes les 30 secondes.
Oui, les disparités sont exacerbées et l'exacerbation des inégalités se transforme en enjeux planétaires. Pour s'enrichir, aujourd'hui comme du temps de l'esclavage, les puissants choisissent de maintenir les Peuples noirs dans la plus cruelle servitude. D'où l'opposition exprimée par Toussaint, le 18 mai 1794, et la promulgation, le 8 juillet 1801, de sa Constitution.
L'article 3 de la Constitution de 1801 stipule qu' :
"Il ne peut exister d'esclaves sur ce territoire. La servitude y est à jamais abolie. Tous les hommes y naissent, vivent et meurent libres."
L'esclave de Bréda, bien qu'Affranchi en 1776 par Bayon Libertat préférait évoquer en général son statut d'esclave en lutte pour la liberté. La liberté de tous : "Je saisis les armes pour la liberté de ma couleur" "La France n'a plus le droit de nous rendre esclave" déclara-t-il à l'arrivée de l'expédition de 1802.
Kòm nou konstate l,
Tousen pa t gen zo nan lang li.
Sèvo l pa t gen ni pousyè, ni pay.
Stratège, il luttait victorieusement contre l'Espagne, l'Angleterre, la France et entra dans l'histoire comme le Spartacus noir annoncé par l'abbé Raynald. Grand homme d'Etat et Humaniste, Toussaint a compris le besoin de lier les concepts liberté et prospérité.
"Le travail est nécessaire, proclama-t-il, il est une vertu et sert au bien général de l'Etat."
"La République n'a pas de place pour les paresseux."
Lavaud lui-même nous confirme avoir rencontré Toussaint à la Petite Rivière où il offrait un spectacle rassurant de 11.000 cultivateurs au travail, tous pleins de gratitude envers la République : noirs, blancs, mulâtres, paysans, propriétaires bénissaient le Chef vertueux grâce à qui régnaient l'ordre et la paix.
Nombre de ses actes témoignent d'un profond sentiment d'humanisme : pardon accordé aux anciens colons condamnés par la France, traitement spécial réservé aux vaincus de la guerre du Sud, et même à ceux qui ont tenté de l'assassiner.
A ce propos, Wendel Philipps nous rapporte, qu'une fois, la voiture du Général en Chef fut criblée de balles. Mais Toussaint n'y était pas. Sept (7) Français soupçonnés de l'attentat furent arrêtés et s'attendaient à être fusillés. Le lendemain était la fête patronale. Le Général fit aligner les prisonniers devant l'autel et au moment de l'absoute, il descendit de son trône, répéta avec le prêtre la formule du pardon puis les renvoya. A travers cette démarche, recherchons non les traces de l'impunité mais celle d'une amnistie puisée à la source de sa foi.
Yon lòt jou,
Tousen desann nan Mibalè,
Li kale Anglè yo pwòp.
Vil la vin rele l pal.
Chè mèt chè mètrès.
Li dekouvri plis pase
300 blan kriminèl
Kite pare pou fizye l.
Yo manke Tousen
E olye Tousen fizye yo,
Li fè yo aliyen devan l.
Blan yo swe.
Swe kon pitit bouki !
Poutan olye Tousen fizye yo,
Li fè yo sèmante
Y ap rete fidèl a Repiblik la.
Ouf ! Blan yo kontan !
Gen nan yo k mande l paspò,
Li ba yo san pwoblèm.
Kidonk, mesye yo jwenn pen,
Yo mande fwomaj !
À ce sujet, l'auteur des Jacobins Noirs, James, ajoute ces propos que je vous invite à écouter avec une attention soutenue : "Comme leurs plantations avaient évidemment été séquestrées, Toussaint fit faire des enquêtes pour envisager leur RESTITUTION."
Tiens ! Restitution ! Toussaint y pensait... Pour eux ! Toussaint y pensait !
Et donc, Restitution et Réparation pour nous, victimes de l'esclavage ! Oui il le faut !
Parce que l'esclavage est un crime contre l'humanité, il nous faut :
Restitution
Réparation
Célébration du Bicentenaire de notre Indépendance.
Parce qu'en 1825, sous le Gouvernement de Boyer, nous avons dû payer 90 millions de francs or à La France, aujourd'hui, nous réclamons au moins la valeur capitalisée pour l'année 2003 soit 21,685,135,571.48 $US.
Que partout retentissent nos voix réclamant pacifiquement et dignement :
Restitution
Réparation
Chers amis de Toussaint Louverture, que partout retentissent nos voix réclamant pacifiquement et dignement :
Restitution
Réparation
A la timoun nou pral voye lekòl !
A la bèl lekòl, bèl inivèsite,
Bèl lopital nou pral bati pou timoun yo !
Peyizan yo pral rale souf !
Wout, traktè, angrè, dlo pou peyizan !
Ala manje k pral genyen a gogo !
Ala kontan granmoun kou timoun pral kontan !
Tousen te renmen timoun anpil.
Kè l te toujou gen yon plas
Rezève pou timoun pòv,
Timoun nan lari,
Timoun ki pa ka al lekòl... tout timoun !
Yon jou, pandan Tousen sot Eneri
Pral Gonayiv a cheval,
Li tande vwa yon timoun k ap rele :
Papa ! Papa ! pran m mennen m avè w.
Se te yon ti òfelen.
Li te rele Rose e l te gen 10 zan.
Brip ! Tousen kanpe cheval la.
Li desann, li pran l e li mennen l
Bay mandan m li.
Tankou yon bon papa,
Tousen di l, men yon ti pitit
Ki sot rele m papa. E ou,
Eske w dakò pou w vin manman l ?
Yo tou 2 tonbe dakò. E depi lè sa a
Ti Rose jwenn yon bèl fanmiy.
Aujourd'hui, nombre d'adversaires de Toussaint s'opposent au Peuple Haïtien. En prolongeant cette crise génocidaire, ils sacrifient le Peuple sur l'autel de Bonaparte, le Premier des Blancs, rejettent Toussaint, le Premier des Noirs, rejettent Haïti, la Première République Nègre du Monde. Au-delà de nos intérêts de parti, de classe ou de race, transcendons et marchons unis contre cette crise génocidaire.
Pèp la pa sòt.
Li wè kiyès ki nan konplo anbago a.
Li wè tout ipokrizi ki vlope anbago a
Pou lavi a vin pi chè. Li pran nòt.
Kreyon k nan men Pèp la
Se kreyon Bondye. Donk il pa gen gòm.
E se pou sa menm Pèp la di :
Anbago a se yon siga ki limen nan 2 bout.
Paske nou tout deside viv anpè,
Nou tout gen enterè kriye byen fò :
Debloke Peyi a.
Pou malere rale souf anba grangou a,
Debloke Peyi a !
Pou gen mwens chomaj, plis travay,
Debloke Peyi a !
Pou gen eleksyon e non koudeta,
Debloke Peyi a !
Kòm bon desandan Tousen Louvèti,
Nou pap ni met ajenou,
Ni vann peyi a
Ni chire batistè diyite n.
An bon kreyòl :
Bon Ayisyen konn grangou,
Men bon Ayisyen pa ti grangou !
Youn nan pi gwo viktim anbago sa a,
Se nou menm Peyizan, Elèv lekòl,
Etidyan ak Jenès peyi a,
34
K ap mande jis kilè n ap rive,
Viv alèz, viv egal ego tout bon vre ?
Bon lekòl, bon pwofesè, bon inivèsite,
Bon jan alfabetizasyon,
Bon jan pwodiksyon nasyonal
Pou tabli lapè nan vant, lapè nan tèt.
Se sa nou vle. E se bèl rèv sa a menm
Tousen te genyen lè l te egzije
Yon lekòl nan chak bitasyon.
Ki di rèv Tousen, di rèv pa nou,
Comme en témoigne Investir dans l'Humain.
Oui, Investir dans l'Humain n'est autre qu'un projet Louverturien devant frayer enfin une ouverture à la dimension du Génie de la race.
Chers concitoyens,
Chères concitoyennes,
Face à l'oppression des Peuples de la Caraïbe, Toussaint entonna l'hymne de la solidarité. Au moment où les yeux du Spartacus Noir pétillaient de liberté, ses regards ouvraient des voies de libération pour les Peuples de la Caraïbe.
Sòti nan mwa oktòb 1798
Rive nan mwa novanm 1799,
Plizyè milye nèg d'Ayiti te deja
Rive nan Jamayik
Pou trase vèvè Libète ak Egalite !
Yon espyon, Douglas,
Trayi plan liberasyon an.
Yo pann Sasportas men van solidarite
Ak tout nèg esklav, kelkeswa peyi
Kote l ye a, pa t sispann soufle.
Qu'il s'agisse de la Jamaïque, Trinidad, Martinique, Guadeloupe, Curaçao partout, en 1795, la contagion révolutionnaire anti-esclavagiste s'est propagée dans toutes les îles de la Caraïbe.
Toussaint, pour avoir voulu défendre les droits de l'homme, hommes et femmes, noirs, mulâtres, blancs, opprimés ou enchaînés, il fut accusé, trahi, arrêté le 10 juin 1802 puis expulsé de St-Domingue ! D'où les mots combien célèbres du Précurseur de l'Indépendance :
"En me reversant, on n'a abattu à Saint-Domingue que le tronc de l'arbre de la liberté des Noirs; mais il repoussera car ses racines sont profondes et nombreuses."
Là, en France, en ce château de Joux, promu au rang de prison d'Etat après la mort du roi soleil en 1715, arriva le prisonnier le plus illustre, notre Cher Toussaint.
Symbole du despotisme de Bonaparte, le Fort de Joux est construit à plus de 900 mètres d'altitude. Ses cellules conservent les empreintes de détenus emblématiques dont Kleist qui avoue avoir été enfermé dans un cachot sans air, sans lumière, en partie taillée dans le roc et fait de grosses pierres brutes.
Que dire du froid qui dévorait les os et la chair du vieux Toussaint qui y arriva
le 23 août 1802.
Si le génie, selon Thomas Edison, c'est 1% d'inspiration et 99% de transpiration, pour nous de la race noire, le génie c'est Toussaint Louverture.
Aussi, loin de voir son rêve de liberté à jamais enfoui dans les neiges jurassiennes, nous y trouvons une source d'inspiration.
Le 7 avril 1803, Toussaint s'est éteint mais au cœur de nos cœurs la flamme de la liberté brillera toujours.
Très chers compatriotes, très chers élèves et étudiants, vous tous, jeunesse de mon pays,
En nous rappelant l'entrée triomphale de Toussaint à Port-au-Prince le 15 mai 1798, dressons aujourd'hui un arc de triomphe à l'ombre de nos cœurs et accueillons l'Esprit du Génie de la Race.
Qu'il nous accompagne jour après jour vers la célébration du Bicentenaire de notre Indépendance.
Avec raison le Président François Mitterrand, débout au Fort de Joux le 31 Mars 1987 s'écria :
"Toussaint est un des grands hommes de ce siècle. Il est le symbole de la libération des esclaves Noirs. Et il est aussi le symbole de la libération de tout Homme."
Et nous aujourd'hui, en ce 7 avril 2003, dignes fils et filles de la Patrie, unis pour la Liberté et l'Egalité, proclamons que Toussaint Louverture Est et demeure : L'Homme du Millénaire !
Merci.
Annexe 2.2. Le Monde, 7 avril 2003, « Haïti réclame 21,7 milliards de dollars à la France » [https://www.lemonde.fr/archives/article/2003/04/07/haiti-reclame-21-7-milliards-de-dollars-a-la-france_315970_1819218.html].
Le président haïtien Jean-Bertrand Aristide a réclamé lundi 7 avril à la France la restitution de la dette de l'indépendance, estimée à 21,7 milliards de dollars, à l'occasion du bicentenaire de la mort du général Toussaint Louverture, précurseur de l'indépendance haïtienne.
« Lors d'une cérémonie devant le musée du Panthéon national haïtien, en présence de plusieurs milliers de personnes, M. Aristide a réclamé cette somme à titre de "restitution et de réparation", affirmant qu'elle était équivalente aux "90 millions de francs lourds" de l'époque payés au XIXe siècle par Haïti à la France en échange de la reconnaissance de son indépendance.
Au cours de son discours, le président haïtien a longuement rendu hommage à Toussaint Louverture, mort le 7 avril 1803 au fort de Joux, dans le Jura, le qualifiant de "génie de la race noire" et estimant qu'il "est et demeure l'homme du millénaire".
Il a aussi annoncé que l'aéroport international de Port-au-Prince porterait désormais le nom d'aéroport Toussaint Louverture, tout comme l'avenue de la capitale qui y conduit. Précédé d'une cérémonie à la cathédrale de Port-au-Prince, la célébration de l'anniversaire de la mort de Toussaint Louverture, décrété jour férié en Haïti, a été l'occasion de nombreux colloques, conférences et émissions de radio et de télévision.
Cet anniversaire marque le coup d'envoi de cérémonies officielles du bicentenaire de l'indépendance d'Haïti. Elles se poursuivront avec les bicentenaires de la création du drapeau haïtien bleu et rouge le 18 mai 1803, de la bataille de Vertières le 18 novembre 1803, qui a consacré la défaite militaire du corps expéditionnaire de Napoléon Bonaparte, puis la proclamation de l'indépendance le 1er janvier 1804. »
Annexe 2.3. Armengaud Jean-Hébert, « La France sommée de « restituer » Haïti réclame 21 milliards de dollars, le «prix» de l'indépendance en 1804. », Libération 31 décembre 2003 [https://www.liberation.fr/evenement/2003/12/31/la-france-sommee-de-restituer_456849/].
« En créole, la banderole coupe une des artères principales de Port-au-Prince : « Restitisyon pou Ayiti. Ochan pou zanset nou yo. » : « Restitution pour Haïti. Honneur à nos ancêtres. » La « restitution », c'est la dernière lubie de Jean-Bertrand Aristide. Il réclame que la France rende à Haïti le « prix de l'indépendance », payé à l'époque par l'ex-colonie à la métropole. Les 90 millions de francs-or du temps de Charles X sont devenus, paraît-il, plus de 21 milliards de dollars. Très exactement 21 685 135 571 dollars et... 48 cents, a calculé textuellement Aristide, le 7 avril, dans un discours pour la célébration du bicentenaire de la mort du héros national de la lutte pour l'indépendance, l'esclave affranchi Toussaint Louverture, mort en prison en France. Le mystère du calcul de la conversion des francs-or en dollars est soigneusement entretenu. « Nous avons fait travailler un groupe d'économistes, explique juste Joseph Antonio, le ministre des Affaires étrangères. Quant aux centimes, cela doit venir de notre manie de la précision, très haïtienne... » Officiellement, la France n'a reçu aucune demande de « restitution » par la voie diplomatique. Port-au-Prince en est encore à faire travailler « des juristes » pour étoffer le dossier. Mais, sur les murs de la capitale, sur les radios et télés à longueur d'antenne, « restitution » aura été le mot de l'année.
Napoléon vaincu. Le 1er janvier 1804, le successeur de Toussaint Louverture, Jean-Jacques Dessalines, proclame à Gonaïves, à 170 km au nord-ouest de Port-au-Prince, l'indépendance du pays. Il a vaincu aidé de la fièvre jaune un corps expéditionnaire napoléonien de 23 000 hommes. Dessalines rebaptise du nom indien de Haïti (de Ayti: « Terre montagneuse ») ce qui n'était que Saint-Domingue, partie française de l'île d'Hispaniola, découverte par Christophe Colomb lors du premier de ses quatre voyages à travers l'Atlantique. Le Génois écrivait en 1492 : « Tous les arbres étaient verts, chargés de fruits [...] C'était la plus grande douceur du monde. » Cinq siècles plus tard, Haïti est un des pays les plus pauvres du monde. Il n'y a plus ou presque plus d'arbres : ils ont été coupés pour en faire du charbon de cuisine. La « Terre montagneuse » a été pelée par la misère. Pourtant, en 1804, quand nègres et mulâtres, esclaves et affranchis, blackboulent Napoléon, Saint-Domingue est encore une richissime colonie, un des pays les plus prospères du monde : cacao, coton, café, sucre, peaux, briques... Cinq nouveaux vaisseaux de commerce mouillent chaque jour dans ses rades. A Bordeaux, Nantes ou Marseille, des fortunes se sont faites grâce à Haïti. La France grince des dents à la déclaration d'indépendance, d'autant que, dans la foulée, Dessalines confisque les biens des colons.
Traité. Du coup, les relations entre les deux pays sont tendues. Napoléon est occupé ailleurs, mais ses successeurs gardent en tête cette « île qui vaut un empire ». Ils insistent pour réclamer des indemnités en faveur des colons expropriés, sur le modèle des colons anglais indemnisés par les Américains après l'indépendance des Etats-Unis. S'ensuivent des années de tractations diplomatiques, plus ou moins dures, de coups de bluff, de rabibochages et de menaces. Finalement, en 1825, Haïti s'engage à payer à la France de Charles X 150 millions de francs « destinés à dédommager les anciens colons ». Une fois payé 30 millions, le solde est revu à la baisse en 1838 et fixé à 60 millions par un traité salué alors en Haïti comme « un vrai succès politique » pour le président haïtien, Jean-Pierre Boyer.
Jean-Bertrand Aristide se dit prêt à déchirer ce traité pour avoir « ses » 21 milliards. « Il n'y avait pas eu de négociations mais une politique de la canonnière, car à l'époque Haïti était constamment sous la menace d'une invasion française, explique Mario Dupuy, secrétaire d'Etat à la Communication. Implicitement, on nous disait : payez ou vous retournerez en esclavage. » L'esclavage : une occasion pour Aristide de réclamer plus encore, au-delà de la seule « restitution ». Il veut des « réparations » pour les « sévices » subis par les esclaves « qui ont contribué à l'enrichissement de la France ». Officieusement, la diplomatie française répond pour l'instant que « ces réclamations n'ont aucune valeur juridique ». Mais Port-au-Prince affirme être prêt à aller jusqu'au bout, c'est-à-dire la justice internationale.
Leurre. Il est peu probable qu'on en arrive jamais là. La demande d'Aristide est surtout un leurre pour détourner les esprits de la crise que traverse le pays. « C'est comme d'habitude une tactique du pouvoir : détourner l'attention dès qu'un problème se pose, explique l'écrivain haïtien Lyonel Trouillot. La vérité, c'est que ce problème de la dette est loin d'être prioritaire pour l'immense majorité des Haïtiens. » « Et si la France nous prend au mot ? ironise un journaliste haïtien. Ne peut-elle pas à son tour se sentir en droit de réclamer la restitution des terres, au nom des descendants des fermiers dépossédés, nous remettre à l'état de colonie et demander à ceux qui ne le désirent pas de retourner chez leurs ancêtres en Afrique, avec le pognon ? »
Le « coup des 21 milliards » plus d'un demi-siècle de budget annuel de l'Etat haïtien permet surtout de désigner un coupable pour l'état chronique de sous-développement dans lequel le pays stagne depuis son indépendance. « Le paiement de ces 90 millions de l'époque a empêché le développement économique de notre pays, assène Mario Dupuy. La France est directement responsable de la misère de notre population ! » Une misère qui ne cesse de s'étendre, comme à Cité Soleil, immense bidonville de centaines de milliers d'habitants aux portes de Port-au-Prince, où, entre des cases de tôle, les enfants jouent dans la boue, les ordures et les porcs le porc, ici, est un élément de l'épargne familiale. Dans la capitale même, l'eau courante est rare et l'électricité ne tourne que quelques heures par jour.
Perfusion. Quelques centaines de millions de dollars de prêts d'institutions financières internationales (FMI, Banque interaméricaine de développement...) sont gelés depuis les sanctions prises après les élections législatives de 2000, trafiquées par Aristide. Haïti subsiste grâce au peu d'aide internationale qui arrive encore, à travers des ONG notamment. Outre l'absence d'une véritable classe d'entrepreneurs capable et désireuse de réinvestir dans le pays, Haïti souffre de corruption chronique, depuis les « zombies de l'administration », ces morts ou démissionnaires qui touchent toujours leur chèque mensuel, jusqu'aux plus hauts niveaux de l'Etat. « Un jour, nous sommes allés voir Aristide pour un énorme projet d'investissement de plusieurs dizaines de millions de dollars, raconte un intermédiaire. Il nous a dit qu'il en voulait une partie pour lui. Nous lui avons demandé s'il s'agissait de trois ou quatre millions à verser à la Fondation Aristide. Il a ri en répondant qu'il voulait 20 % et directement sur son compte. » Le projet ne s'est pas réalisé.
« La vraie question, c'est la façon dont nous-mêmes avons conduit notre développement, reconnaît l'économiste Carmelle Jean-Marie. Et, finalement, que la France paie ou non 21 milliards de dollars, ça ne nous avance en rien si cet argent n'est pas canalisé via un vrai plan de développement. »
Annexe 2.4. Tribune de Louis-Philippe Dalembert (« écrivain haïtien, ex-pensionnaire de la villa Médicis ») « N'effaçons pas la dette française envers Haïti », Libération, 6 janvier 2004
« Difficile de lire dans les journaux français les articles relatifs à la restitution, par la France, de la dette de l'indépendance haïtienne sans en être sinon choqué, du moins ressentir un certain malaise. Confusion plus ou moins pilotée en sous-main par le Quai d'Orsay, ignorance, voire indifférence ?
Rappelons les faits : le 1er janvier 1804, après treize ans d'une guerre sans merci, Saint-Domingue, le fleuron des colonies françaises de l'époque, devient indépendant sous le nom d'Haïti. La réaction de la métropole ne se fait pas attendre : elle impose un embargo à la jeune nation. C'est que l'ancienne colonie faisait vivre un Français sur huit. Après des années de tractations, en 1825, Haïti se voit obligé de verser à la France de Charles X la somme de 150 millions de francs lourds «destinés à dédommager les anciens colons». En échange, en fait, de la reconnaissance de son indépendance durement acquise. Le versement de cette somme est en outre assorti d'un accord d'exclusivité en faveur des produits français qui entrent désormais en Haïti sans droits de douane. La somme est empruntée à une filiale de banque française, la première et la seule du pays jusqu'au début du XXe siècle.
Pour rembourser l'emprunt ainsi contracté, l'état haïtien a eu recours pendant plus d'un siècle à la levée de lourds impôts sur la paysannerie. En 1942, le gouvernement d'Elie Lescot a même lancé un appel à souscription national pour réunir ce qui devait être la dernière tranche du remboursement jusqu'auprès des élèves du primaire. La dette ne sera définitivement soldée, remboursée au dernier sou, qu'en 1972. Voilà les faits.
Le 7 avril dernier, jour du bicentenaire de la mort de Toussaint Louverture au fort de Joux, dans le Jura, M. Aristide, dont le pays exige le départ, tente de faire diversion et réclame à la France la restitution de cette dette. Dans son discours à l'emporte-pièce et sans véritable argumentation, il confond d'ailleurs restitution et réparation. Confusion reprise depuis ad libitum. On jubile au Quai d'Orsay. Le paiement d'éventuelles réparations pour l'esclavage en tant que crime contre l'humanité est un dossier multilatéral, qui dépasse de loin les relations entre la France et Haïti. Irrecevable donc. En outre, on a eu un aperçu, il y a deux ans à la conférence de Durban, de la difficulté à traiter de cet argument. La restitution de la dette de l'indépendance est un dossier bilatéral. Pour l'heure, on est en face d'un marché de dupes où chacun, M. Aristide d'un côté, le gouvernement français de l'autre, essaie de manipuler l'opinion des deux peuples et de tirer la couverture à soi. Que le tyran Aristide tente d'utiliser la demande de restitution de la dette pour détourner l'attention des Haïtiens de l'essentiel et s'accrocher au pouvoir, cela ne fait aucun doute. Faut-il ajouter que ce régime corrompu et répressif, dont tous, Haïtiens du dedans comme de la diaspora, souhaitent le départ, n'est pas le mieux placé pour défendre un tel dossier ?
Une fois ces données admises, le malaise tient de l'impression que la situation chaotique d'Haïti fait l'affaire de certains. Pourquoi, sinon, forcer aussi souvent les Haïtiens à se prononcer dans un tel contexte sur la question de la restitution de la dette de l'indépendance ? Il s'agit d'abord et avant tout, il me semble, de chasser du pouvoir un apprenti dictateur. Où est le rapport avec la dette de l'indépendance ? N'est-il pas permis d'être anti-Aristide et pour la restitution en même temps ? L'objectif serait-il de profiter de la confusion actuelle pour empêcher le dossier de revenir sur le tapis après le départ d'Aristide et le classer une fois pour toutes dans le rayon pertes et profits de l'Histoire ? Loin de nous l'idée de rendre la France seule responsable du désastre économique d'Haïti. L'incurie, la corruption et l'incompétence des Haïtiens eux-mêmes y sont certainement pour beaucoup. La mainmise des Américains au début du XXe siècle a achevé la dérive de ce petit pays. Mais le versement de la dette de l'indépendance à la France et l'emprunt ainsi contracté y ont aussi contribué.
Le malaise participe aussi de la difficulté à trouver aujourd'hui dans l'Hexagone, où pourtant la liberté d'opinion relève presque du sacré, des personnalités intellectuelles pour plaider en faveur de la restitution de cette dette. Dès que la question est abordée, soit elle est tournée en dérision, sous prétexte qu'il s'est passé trop de temps, soit l'accent est mis sur les malversations et les atteintes aux droits de l'homme de l'actuel gouvernement haïtien. Ce dernier argument est bien sûr imparable. Mais il ne saurait suffire à évacuer la question. Tout se passe comme si intellectuels et journalistes étaient autant de ministres des Affaires étrangères français, dont le souci premier est de défendre les intérêts de la France.
Si envisager des compensations de l'esclavage se révèle très complexe, il n'est pas interdit de parler de restitution d'une dette immorale et inique, dont la France ne sort pas grandie. Reste, bien sûr, à savoir sous quelle forme et à quel gouvernement haïtien. La députée de la Guyane, Christiane Taubira, a suggéré au début de l'année 2003 la création d'un fonds d'intervention qui irait en priorité à l'éducation, la santé ainsi que le logement, et qui serait géré par des personnalités haïtiennes et françaises. L'idée aurait pu être retenue, mais elle n'a guère rencontré d'écho. C'est vraiment dommage qu'au pays de Victor Hugo et d'Emile Zola il n'y ait qu'une députée, originaire d'une ancienne colonie, pour réclamer officiellement la restitution de la dette de l'indépendance haïtienne. La France pourtant aurait tout à gagner, et pas seulement en termes d'image et de grandeur. »
Annexes 3. Extraits des Constitutions du 20 mai 1805 et du 2 juin 1816
Annexes 3. Extraits des Constitutions du 20 mai 1805 et du 2 juin 1816, Louis-Joseph Janvier, Les constitutions d'Haïti (1801-1885), Paris, C. Marpon et E. Flammarion, 1886, pp. 32, 39 et 116 [disponible sur Gallica] et [https://mjp.univ-perp.fr/constit/ht1805.htm].
Constitution du 20 mai 1805
Déclaration préliminaire.
Article 12. Aucun blanc, quelle que soit sa nation, ne mettra le pied sur ce territoire, à titre de maître ou de propriétaire et ne pourra à l'avenir y acquérir aucune propriété.
Du Gouvernement
Article 36. L'Empereur ne formera jamais aucune entreprise dans la vue de faire des conquêtes ni de troubler la paix et le régime intérieur des colonies étrangères.
Dispositions générales.
Article 12. Toute propriété qui aura ci-devant appartenu à un blanc français est incontestablement et de droit confisquée au profit de l'État.
Article 13. Tout Haïtien qui, ayant acquis une propriété d'un blanc français, n'aura payé qu'une partie du prix stipulé par l'acte de vente, sera responsable, envers les domaines de l'État, du reliquat de la somme due.
Article 21. L'agriculture, comme le premier, le plus noble et le plus utile de tous les arts, sera honorée et protégée.
Article 22. Le commerce, seconde source de la prospérité des États, ne veut et ne connaît point d'entraves. Il doit être favorisé et spécialement protégé.
Constitution du 27 décembre 1806
Titre X. De la culture et du commerce.
Article 171. La culture, première source de la prospérité de l'État, sera protégée et encouragée.
Article 172. La police des campagnes sera soumise à des lois particulières.
Article 173. Le commerce, autre source de prospérité, ne souffrira point d'entraves et recevra la plus grande protection.
Constitution du 17 février 1807
Titre IX. De la garantie des colonies voisines.
Article 36. Le gouvernement d'Haïti manifeste aux puissances qui ont des colonies dans son voisinages sa résolution inébranlable de ne point troubler le régime par lequel elles sont gouvernementées.
Article 37. Le peuple d'Haïti ne fait point de conquêtes hors de son île, et se borne à conserver son territoire.
Constitution du 2 juin 1816
Titre premier. Dispositions générales.
Article 38. Aucun blanc, quelle que soit sa nation, ne pourra mettre le pied sur ce territoire à titre de maître ou de propriétaire.
Article 39. Sont reconnus Haïtiens, les blancs qui font partie de l'armée, ceux qui exercent des fonctions civiles, et ceux qui sont admis dans la République à la publication de la Constitution du 27 décembre 1806 ; et nul autre à l'avenir, après la publication de la présente révision, ne pourra prétendre au même droit, ni d'être employé, ni de jouir du droit de citoyen, ni acquérir de propriété dans la République.
Titre III. État politique des citoyens.
Article 44. Tout Africain, Indien et ceux issus de leur sang, nés dans les colonies ou en pays étrangers, qui viendraient résider dans la République seront reconnus Haïtiens, mais ne jouiront des droits de citoyen qu'après une année de résidence.
Titre X. De l'agriculture et du commerce.
Article 215. L'agriculture, première source de la prospérité des États, sera protégée et encouragée. Son accroissement et sa durée dépendent uniquement de la confiance et de la justice qui doivent réciproquement exister entre le propriétaire et le cultivateur.
Article 216. La police des campagnes sera soumise à des lois particulières.
Article 217. Le commerce, autre source de félicité, ne souffrira point d'entraves et recevra la plus grande protection.
Article 218. La personne des étrangers, ainsi que leurs établissements de commerce, sont placés sous la loyauté et la sauvegarde de la nation.
Annexe 4. La France, l’Angleterre et Saint-Domingue Haïti. Le traité de Paris du 30 mai 1814.
Annexe 4.1. Extraits du Traité de Paris du 30 mai 1814 confirmé par le traité de 1815 Martens (G. de), Nouveau recueil de traités d’alliance, de paix, de trêve, de neutralité, de commerce, (etc.), Tome II., Gottingue, 1818 [https://mjp.univ-perp.fr/traites/1814paris.htm] :
Art. VIII. S. M. Britannique stipulant pour elle et ses alliés, s'engage à restituer, à S. M. très-chrétienne, dans les délais qui seront ci-après fixés, les colonies, pêcheries, comptoirs et établissements de tout genre que la France possédait au 1 janvier 1792 dans les mers et sur les continents de l'Amérique, de l'Afrique, et de l'Asie, à l'exception toutefois des îles de Tobago et de Sainte-Lucie, et de l'île de France et de ses dépendances, nommément Rodrigue et les Séchelles, lesquelles S. M. très-chrétienne cède en toute propriété et souveraineté à S. M. Britannique, comme aussi de la partie de Saint-Domingue cédée à la France par la paix de Bâle et que S. M. très-chrétienne rétrocède à S. M. catholique en toute propriété et souveraineté.
Art. IX. S. M. le Roi de Suède et de Norvège, en conséquence d'arrangements pris avec ses alliés, et pour l'exécution de l'article précédent, consent à ce que l'île de la Guadeloupe soit restituée à S. M. Très-chrétienne, et cède tous les droits qu'il peut avoir sur cette île.
Art. X. S. M. très-fidèle, en conséquence d'arrangements pris avec ses alliés, et pour l'exécution de l'article VIII, s'engage à restituer à S. M. très-chrétienne, dans le délai ci-après fixé, la Guyane Françoise, telle qu'elle existait au 1 janvier 1792.
L'effet de la stipulation ci-dessus, étant de faire revivre la contestation existante à cette époque au sujet des limites, il est convenu que cette contestation sera terminée par un arrangement amiable entre les deux cours, sous la médiation de S. M. Britannique.
Art. XI. Les places et forts existants dans les colonies et établissements qui doivent être rendus à S. M. très-chrétienne, en vertu des articles VIII, IX et X, seront remis dans l'état où ils se trouveront au moment de la signature du présent traité.
Annexe 4.2. Le Pelletier de Saint-Rémy Romuald, Saint-Domingue : étude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, [consultable sur http://www.manioc.org/], tome 2, Livre troisième, pp. 5-7.
Quelle position firent à Saint-Domingue, dans le droit public européen, les grandes conventions régulatrices de 1814 ? — Cette question n'a été approfondie par aucun des écrivains qui ont traité la matière. A cette question se rattachent pourtant et les mécomptes qu'a éprouvés la France dans les négociations entamées avec son ancienne colonie, et le caractère peu définitif de la solution qui a mis fin à ces négociations. Chacun a cité le traité de Paris qui réserve les droits de la France sur la partie française de Saint-Domingue, et tout a été dit. — Il est d'abord à remarquer que le traité de Paris ne pouvait rien stipuler et ne stipule rien de précis à cet égard. Cette convention porte seulement que S. M. T. C. rentrera en possession de tout ce qu'elle possédait en Amérique, au 1er janvier 1792. Une époque est fixée pour la remise des lieux occupés par S. M. B. ; mais Saint-Domingue ne pouvait être compris dans cette clause, attendu que cette colonie n'était occupée ni par l'Angleterre ni par aucune des autres puissances contractantes.
Voilà pour le traité patent du 30 mai 1814. Son caractère peu explicite aurait dû faire comprendre aux écrivains, qui l'ont cité, qu'il ne disait pas tout ce qui avait dû être dit, et que quelque article additionnel suppléait à son silence. En effet, huit jours après sa signature définitive, le souverain négociateur de la France minutait de son écriture imperceptible le billet suivant, adressé à son collègue dans les conseils du roi, le baron Malouet, ministre de la marine et des colonies. « Monsieur le « Baron, il a été signé, à la suite du traité définitif de paix avec l'Angleterre, un article secret « relatif à la colonie de Saint-Domingue : — Je dois « naturellement vous en donner connaissance, et, « à cet effet, j'ai l'honneur de vous en adresser, « pour vous seul, une copie certifiée. — Signé : le « prince de Bénévent. » Cet article secret, qui est un chef-d'œuvre de diplomatie britannique, était ainsi conçu : « Dans le cas où S. M. T. C. jugerait « convenable d'employer quelque voie que ce soit, même celle des armes, pour récupérer Saint-Domingue, et ramener sous son obéissance la population de cette colonie, S. M. B. s'engage à ne point y mettre, ou permettre qu'il y soit mis par aucun de ses sujets, ni directement, ni indirectement, obstacle. — S. M. B. réserve cependant à « ses sujets le droit de faire le commerce dans les ports de l'île de Saint-Domingue qui ne seraient ni attaqués ni occupés par les autorités françaises. »
Annexe 5. Carte des Antilles en 1815
Carte des Antilles en 1815, Atelier de Cartographie, Sciences Po, 2015 [https://www.sciencespo.fr/cartographie/ressources/]. Voir aussi « Les Antilles à la fin du XVIIIe siècle », in Christian Grataloup, Atlas historique mondial, Paris, Les Arènes – L’Histoire, 2019, pp. 268-269.
Annexes 6. La France, l’Angleterre et la question de Saint-Domingue / Haïti
Annexe 6.1. Correspondence, Despatches, and other Papers, of Viscount Castlereagh; second Marquess of Londonderry, edited by his Brother, Charles William, Marquess of Londonderry, G.C.B., G.C.H., G.B.E., ETC., London, John Murray, 1853, vol. XII, pp. 2-7 [disponible en Google Book].
Mr. James Stephen* to Lord Castlereagh.
Kensington Gore, September 8, 1818.
[…] Suggestions relative to Africa and Colonial Discussions that may have place
in the Congress at Aix--la-Chapelle.
HAYTI, OR ST. DOMINGO.
lt would be of unspeakable importance to Great Britain, if means could be found to induce France to release her claim of sovereignty in Hayti, or, if this cannot be accomplished, at least to prevent her from asserting that claim by war. The reasons are chiefly these:
lst. If France is left in her present relations to Hayti when the Allied armies are withdrawn, it cannot be expected that she will persist in her present passive line of conduct, permitting British and American merchants to enjoy without interruption all the commerce of the country, while she herself derives nothing from it but a barren title. Her past forbearance has probably proceeded from the difficulties of her situation, which
would have made even a blockade of the Haytian ports, and much more a military invasion of the island, a more expensive undertaking than she could well sustain. There might be a fear, too, of disputes with Great Britain or the United States from the measures necessary to put a stop to their commerce with Hayti; and these, while the Allied armies were in France, might have been productive of much embarrassment and mortification. No inference, at least, can be drawn from the past, that she will acquiesce in the practical independence of a country which she claims as a French colony, when the impediment and the excuse arising from the occupation of her own territory by foreign armies shall have ceased.
2ndly. It is quite clear that, if Hayti is to be brought again under the dominion of France, it must be by force of arms. The voluntary submission of the Negroes cannot possibly be expected. They know by dreadful experience the gross perfidy and ruthless cruelty of those who were their former masters. They will not, and they ought not, to distinguish in this respect between submission to Buonaparte and submission to Louis XVIII. In both cases, their inexorable enemies are the French planters, to whom they once belonged. These were the instigators of the First Consul; they are equally so of the King; and these are enemies whom nothing can satisfy but their submission, not only to the French sceptre, but to the whip. The Mulattoes and the anciens libres among the Negroes were weak enough to think that antipathy and disdain for their complexion at least might be worn out in the bosoms of white colonists by the humbling lessons of adversity, or, if not, would be restrained by the dictates of self-preservation. They, therefore, trusted to the solemn engagements of Leclerc, and helped him by force and fraud to place Toussaint under a necessity of accepting the treacherous pacification which cost him his life. But he was speedily revenged upon them by the perfidy of their French allies. The planters could not wait till they were safe for the indulgence of their inveterate and invincible antipathies, any more than for the recovery of their despotic authority on the plantations. They preferred destruction to equality of rights and society in arms with free Negroes and Mulattoes. They urged Leclerc and Rochambeau, if the latter monster, indeed, required solicitation, to adopt their own frantic views. The coloured leaders and officers were seized and cruelly butchered and destroyed, even in the very towns and forts which their arms had recently rescued from an infuriated enemy, and by the very men whom their bravery had preserved: torture, as well as death, was their reward, and all this without trial, without inquiry, without accusation even, or the rational suspicion of a crime. The only cause was that they had African blood in their veins, and that the men to whom they had given back their property and their power were West Indians. The history of human wickedness has nothing to compare with the horrible ingratitude, perfidy, and cruelty, of which they were the victims, or with the horrors that ensued. For the honour of human nature, one would wish to disbelieve, but the dreadful tale rests not on the credit of the Haytians. It is confirmed through every possible source of evidence. It has never been contradicted, either by the French Government or its agents. It has been publicly attested by some of the French officers who were eye-witnesses, and apparently also unwilling instruments, of those atrocious crimes. The pamphlet of Colonel Malenfant especially will carry conviction home to the mind of any man who entertains a doubt on the subject.
Driven as the surviving Mulatto leaders and their followers were to cast themselves on the confidence and mercy of the Blacks, and to stimulate the latter to new efforts for their common preservation, the distinction between les anciens and les nouveaux libres was forgotten in the mutual danger and the mutual thirst for revenge. With their triumph and security it again in some degree revived. lt bas been the chief source of the schism between the Haytians of the South, under Petion, and tbose of the North, under Henri Christophe, and of the intestine war which, for several years, was carried on between them. Not that any large proportion of the Negroes in the South can now be anciens libres, or persons free before the revolution; but many of them were slaves of the Mulatto planters, and the rest, to whichever description they formerly belonged, have ranged themselves successively under Rigaud and Petion, from local or other attachments. Many also, it is said, have lately emigrated from the North to the South, from the allurements of that comparative laxity of military discipline and civil police which prevailed under Petion's government.
This distinction of parties and division of power has been supposed favourable to the counter-revolutionary purposes of France. But neutral persona, who have resided in the island, or obtained good information of its state, are of a contrary opinion. Though Petion was more moderate in his language than King Henry, both, it is believed, were equally determined rather to perish than ever again submit to the dominion of France. The only difference was that Petion was not indisposed to provide some modified indemnity to the ex-proprietors for the loss of their lands, which Henry indignantly refused […]
*Mr. Stephen, a native of the West Indies, was sent at an early age to England, to pursue the profession of the law. By means of a matrimonial alliance with the family of Mr. Wilberforce, he obtained a seat in Parliament, which he resigned on being appointed Master in Chancery, in order to attend to the duties of that office.
Annexe 6.2. Accord passé entre Talleyrand et le représentant de l’Angleterre au Congrès de Vienne, 1814, cité in Blancpain François, Gainot Bernard, « Les négociations des traités de 1838 », La Révolution française. Cahiers de l'Institut d'histoire de la Révolution française, 16 | 2019 [https://journals.openedition.org/lrf/2757]
« […] Dans le cas où Sa Majesté Très Chrétienne jugerait convenable d’employer quelque voie que ce soit, même celle des armes, pour récupérer Saint-Domingue et ramener sous son obéissance la population de cette colonie, Sa Majesté Britannique s’engage à ne point y mettre ou permettre qu’il y soit mis par aucun de ses sujets, ni directement, ni indirectement, obstacle. Sa Majesté Britannique réserve cependant à ses sujets le droit de faire le commerce dans les ports de l’île de Saint-Domingue qui ne seraient ni attaqués ni occupés par les autorités françaises […] »
Annexes 7. Négociations 1814-1825.
Annexe 7.1. Malouet, Instructions pour MM. Dauxion Lavaysse, de Médina et Dravernau, 1814, cité par Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.5, pp. 260- 267 [consultable en Google Book].
Les intentions paternelles de Sa Majesté étant de rétablir l’ordre et la paix dans les parties de ses États par les moyens les plus doux, Elle a résolu de ne déployer sa puissance, pour faire rentrer les insurgés de Saint-Domingue dans le devoir, qu’après avoir épuisé toutes les mesures que lui inspire sa clémence. C’est plein de cette pensée que le Roi a porté ses regards sur la colonie de Saint-Domingue. En conséquence, quoi qu’il ait donné l’ordre de préparer des forces majeures et de les tenir prêtes à agir si leur emploi devenait nécessaire, il a autorisé son ministre de la Marine et des Colonies à envoyer à Saint-Domingue des agents pour prendre une connaissance exacte des dispositions de ceux qui y exercent actuellement un pouvoir quelconque ; de même que la situation où se trouvent les choses et les individus de toutes classes.
[…] qui doute que si le roi de France voulait faire peser toutes ses forces sur une portion de sujets rebelles qui sont à peine un centième de la population de ses États, qui n’ont en eux, ni chez eux, aucun des grands moyens militaires, moraux ou matériels de l’Europe, qui seront privés de tout secours extérieur, qui doute, disons nous, qu’il ne les réduisît, dût-il les exterminer…
[…] En résumé, ils ne promettront rien au-delà de ce qui va être énoncé, après avoir tout fait pour demeurer en deça.
1°) A Pétion, Borgella et quelques autres (toutefois que la couleur les rapproche de la caste blanche) assimilation entière aux blancs et avantages honorifiques ainsi que de fortune.
2°) Au reste de leur caste actuellement existant, la jouissance des droits politiques des blancs, à quelques exceptions près qui les placent un peu au-dessous.
3°) A tout ce qui est moins rapproché du blanc que le franc mulâtre, ces droits politiques dans une moindre mesure.
4°) Aux libres qui sont tout à fait noirs, encore un peu moins d'avantages.
5°) Attacher à la glèbe, et rendre à leurs anciens propriétaires, non seulement tous les noirs qui travaillent actuellement sur les habitations, mais encore ramener le plus possible de ceux qui se sont affranchis de cette condition.
6°) Purger l'île de tous les noirs qu'il ne conviendrait pas d'admettre parmi les libres et qu'il serait dangereux de rejeter parmi ceux attachés aux habitations.
7°) Restreindre la création de nouveaux libres de la manière indiquée plus haut.
"Lorsque les agents seront convenus de ces bases avec les chefs, ils y ajouteront les conditions suivantes :
1°) Il est bien entendu que pour que l'ordre se rétablisse à Saint-Domingue, les lois de la propriété et tous les principes qui assurent la garantie doivent être établis et respectés de telle manière que chaque propriétaire muni de ses titres d'acquisition ou d'hérédité, ou de l'acte de notoriété qui la constate légalement, soit remis en possession de ses biens et bâtiments dans l'état où ils se trouveront, sans égard aux dispositions arbitraires qui pourraient avoir été faites par ceux qui jusqu'à cette époque auraient exercé quelque pouvoir public.
2°) L'admission aux droits politiques de tous les gens de couleur, l'assimilation même des principaux propriétaires de la première classe qui pourrait en être faite aux blancs, laisse toujours à la disposition du Roi et de ses représentants, le choix de ceux qui paraitraient le plus susceptibles d'emplois supérieurs, ou même inférieurs, dans les places civiles ou militaires, de telle sorte qu'aucun d'eux ne soit reconnu avoir un droit acquis, mais seulement éventuel, de même que les blancs, aux emplois supérieurs ou inférieurs. Quant à ceux qui sont actuellement investis des pouvoirs du gouvernement colonial il est entendu que leur soumission entière à Sa Majesté et le succès de leur influence sur la caste qui leur obéit leur assureront les grâces du Roi, mais sans aucune stipulation qui puisse engager dans telle ou telle forme l'autorité souveraine ; les dits chefs devant s'en rapporter entièrement à la volonté et à la bonté du Roi. Lorsque tous ces points auront été discutés et convenus, il en sera dressé procès verbal et cet acte sera, après leur soumission écrite, leur garantie effective, en ce qu'il ne sera désormais rien exigé d'eux qui ne soit conforme aux présentes instructions signées par moi Secrétaire d'Etat, ministre de Sa Majesté.
Annexe 7.2. Pétion à Dauxion-Lavaysse, 12 novembre 1814, cité par Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.5, p. 251 [consultable en Google Book].
Je demande à Votre Excellence si nous pouvons rétrograder, si nous pouvons nous départir des avantages précieux que nous nous sommes procurés de la liberté dans toute l'étendue de sa signification, de l'égalité parfaite de nos droits et de la garantie que nous tenons par les armes qui sont dans nos mains. Toutefois les Haïtiens ont été si souvent et si cruellement trompés qu'un esprit de défiance presque indestructible s'est établi parmi eux... Aucune confiance peut-elle renaître ?
Annexe 7.3. King Henry to Thomas Clarkson, in Henry Christophe and Thomas Clarckson. A Correspondance, Edited by EarlLeslie Griggs and Clifford H. Prator, Berkeley & Los Angeles, University of California Press, 1952, pp. 97 et 101 [https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=mdp.39015008705660&view=1up&seq=12].
At the Palace of San Souci , this 18th of November , 1816 ,
in the 13th year of our Independence
THE KING , to Mr. Thomas Clarkson , etc .
Dear Sir and Friend […]
We shall never again be deceived by the French Government , for we know that so long as it is influenced by the ex -colonists , it can never entertain just notions concerning us ; and even if it should in appearance agree to a few concessions , it would only be for the purpose of deceiving us more thoroughly . If France should demand the exclusive commerce of the island, what would this be but a breach of our independence? And what right or title has that nation to make such a demand?
Nor would France be more successful if she brought before the allied powers the principle of her right of possession. The example which she formerly gave by her conduct toward the United States of America would turn this argument against herself.
After having tried to massacre our entire population and failed in the attempt, how could France convince anyone by a declaration that she would rule in Haiti as over a free people?
Nothing short of absolute independence in both government and commerce will satisfy us. This we shall have, or cease to live.
The French Cabinet has just made a new attempt and again insulted the Haitian people by sending out as commissioners three ex -colonists, all of them discredited and disgraced in Haitian eyes. You will see by the public papers which I am sending you the unbecoming and ridiculous manner in which these men attempted to open negotiations with us.
Annexes 7.4. Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895, pp. 49-52 [https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=uiug.30112109168432&view=1up&seq=68]. Ces extraits sont aussi cités dans Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001, pp. 50-51.
7.4.1. Lettre d’Abel Aubert Dupetit-Thouars à Jean-Pierre Boyer, 8 mai 1821.
Les prétentions de la France sont si modérées, si justes ; sa conduite avec Haïti, depuis la restauration, a été telle, que V. Ex. est beaucoup trop éclairée pour ne pas y voir le désir le plus sincère de terminer y à l'amiable cette lutte déjà trop longue.
[…] Je dois faire connaître à Votre Excellence que Sa Majesté désirant le bonheur des habitants de la partie de l'île soumise à votre domination, et non de porter parmi eux le trouble et la guerre civile, avait pensé qu'une telle reconnaissance serait peut-être funeste à la réunion et à la paix que vous venez d'établir avec tant de succès. Sa Majesté a voulu donner une preuve de son désir sincère de la réconciliation, de sa bienveillance pour Votre Excellence, et en même temps de sa sollicitude pour un pays qu'elle regarde toujours comme français ; elle s'est décidée à consacrer l'indépendance de la République d'Haïti.
« En prenant une telle résolution, Sa Majesté s'est attendue à trouver dans Votre Excellence et son gouvernement des dispositions analogues ; elle s'attend à voir reconnaître sa simple suzerainetė, ou à la France un droit de protection semblable à celui que l'Angleterre exerce à l'égard du gouvernement des Iles Ioniennes. Ce droit ne peut qu'être avantageux à la République, et utile à son indépendance, en écartant toutes les prétentions que l'on pourrait élever sur elle ; d'un autre côté, il assure à la France la libre jouissance du commerce avec Haïti.
Sa Majesté ne désire le commerce qu'aux conditions établies pour la Puissance la plus favorisée ; car, dans l'intérêt d'Haïti, qui sera aussi celui de la France, après le traité, il importe qu'il ne soit pas fait de conditions qui puissent, par suite, troubler l'ordre de la République. Ces derniers motifs font tenir aux indemnités pour le territoire et les propriétés.
7.4.2. Lettre de Jean-Pierre Boyer à Esmangart, 10 mai 1821, Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895, pp. 49-52 [https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=uiug.30112109168432&view=1up&seq=68]. Cet extrait est aussi cité dans Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001, pp. 50-51.
Vous avez dû, M. le Préfet, pendant votre séjour au Port-au-Prince, en 1816, vous bien convaincre que le gouvernement de la République ne faisait qu'interpréter l'inébranlable volonté du peuple, en demandant que la reconnaissance de l'indépendance d'Haïti, de la part S. M. T. C. fût pure et simple ; car la prospérité du pays et l’honneur national ne permettent pas qu'il soit porté la moindre atteinte à cette indépendance, soit en admettant la suzeraineté directe ou indirecte, soit en se plaçant sous la protection d'aucune puissance quelconque. A cet égard, mon prédécesseur s'est trop bien ouvert aux commissaires du roi de France, du nombre desquels vous faisiez partie, pour qu'il soit nécessaire d'entrer aujourd'hui dans d'autres explications. « C'est au moment où la République jouit de la paix intérieure, où elle est fréquentée par le commerce de toutes les nations, que la question de la reconnaissance de son indépendance est, de nouveau, vivement agitée ; et c'est pour donner au monde entier une preuve de la loyauté haïtienne que je serai disposé à faire revivre l'offre d'une indemnité raisonnablement calculée, qu'avait faite mon prédécesseur à l'époque de la première mission que la France envoya ici, et qui fut écartée en 1816, dans le cas ou S. M. T. C. reconnaîtrait la nation haïtienne, comme elle l'est de fait, libre et indépendante ; alors, le commerce français pourra être, en Haïti, traité sur le pied de l'égalité avec celui des nations qui y sont le plus favorisées ; mais il sera bien entendu que la République d'Haïti conservera une neutralité parfaite dans toutes les guerres que les puissances maritimes se feraient entre elles.
7.4.3. Déclaration de Jean-Pierre Boyer 1824. Justin Joseph, Les relations extérieures d’Haïti. Études historiques et diplomatiques, Paris, Albert Savine, 1895, p. 54 [https://babel.hathitrust.org/cgi/pt?id=uiug.30112109168432&view=1up&seq=68]. Cet extrait est aussi cité dans Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001, p. 53.
En 1814, on voulait nous imposer la souveraineté absolue de la France ; en 1821, on ne demandait plus qu'une simple suzeraineté ; en 1823, lors de la négociation du général Boyé, on se bornait à réclamer comme condition sine qua non, l'indemnité que nous avions offerte précédemment ; par quel retour à un esprit de domination, veut-on en 1824 nous assujettir à une souveraineté extérieure ? Cette souveraineté nous paraît injurieuse, et contraire à notre sécurité ; c'est pourquoi nous la rejetons.
Annexes 8. L’ordonnance de 1825
Annexe 8.1. Ordonnance de Charles X Roi de France concernant l'indépendance de l'île de St. Domingue, du 17 avril 1825.
Charles par la grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre,
A tous ceux qui ces présentes verront, salut :
Vu les articles 14 et 73 de la charte.
Voulant pourvoir à ce que réclament l'intérêt du commerce français, les malheurs des anciens colons de St. Domingue, et l'état précaire des habitants actuels de cette île ;
Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit :
Article premier.
Les ports de la partie française de St. Domingue seront ouverts au commerce de toutes les nations. Les droits perçus dans ces ports, soit sur les navires, soit sur les marchandises, tant à l'entrée qu'à la sortie, seront égaux et uniformes pour tous les pavillons, excepté le pavillon français, en faveur duquel ces droits seront réduits de moitié.
Article 2.
Les habitants actuels de la partie française de St. Domingue verseront à la caisse générale des dépôts et consignations de France, en cinq termes égaux, d'année en année, le premier échéant au trente un décembre mil huit cent vingt - cinq, la somme de cent cinquante millions de francs, destinés à dédommager les anciens colons qui réclameront une indemnité.
Article 3.
Nous concédons à ces conditions par la présente ordonnance, aux habitants actuels de la partie française de l'île de St. Domingue l'indépendance pleine et entière de leur gouvernement.
Et sera la présente ordonnance, scellée du grand sceau.
Donné à Paris, au château des Tuileries, le 17 avril, l'an de grâce 1825, et de notre règne le premier.
CHARLES.
Par le Roi,
Le pair de France, ministre secrétaire d'état du département de la marine et des colonies,
Comte de Chabrol.
Vu au sceau
Le garde - des - sceaux de France, ministre secrétaire d'état au département de la justice,
Comte de Peyronnet.
Visa
Le président du conseil des ministres,
J. de Villèle.
Annexe 8.2. « Ordonnance », in Dictionnaire de l'Académie Française, sixième édition publiée en 1835, Paris, Imprimerie et librairie de Firmin Didot Frères, 1835, tome second, p. 309.
Annexe 8.3. Note de Jean-Pierre Boyer au baron de Mackau, 8 juillet 1825, cité in R. Lepelletier de Saint-Rémy, Saint-Domingue. Etude et solution nouvelle de la question haïtienne, Paris, Arthus Bertrand, 1846, Tome II, Livre troisième, Indemnité Indépendance, pp. 53-54 [http://www.manioc.org/patrimon/SCH13080]. La note est aussi citée dans Blancpain François, Un siècle de relations financières entre Haïti et la France (1825-1922), Paris, L’Harmattan, 2001, p. 59.
Monsieur le Baron,
Les explications contenues dans votre note officielle en date d'hier, prévenant tout malentendu sur le sens de l'article 1er de l'ordonnance du roi de France qui reconnait l'indépendance pleine et entière du gouvernement d'Haïti, et confiant dans la loyauté de Sa Majesté Très-Chrétienne, j'accepte au nom de la nation cette ordonnance, et je vais faire procéder a son entérinement au sénat avec la solennité convenable.
Recevez, monsieur le Baron, etc.,
Signé B O Y E R
Au palais national du Port-au-Prince,
Le 8 « juillet 1825
An 22e de l'indépendance.
Annexe 8.4. Proclamation du président Boyer acceptant l'ordonnance française, in Outre-mers, tome 90, n°340-341, 2e semestre 2003, Haïti Première République Noire, p. 250 [https://www.persee.fr/doc/outre_1631-0438_2003_num_90_340_4059]. D'après Thomas Madiou, Histoire d'Haïti, Port-au-Prince, Éditions Henri Deschamps, 1988, tome VI, p. 468-469 (réimpression de l'édition de 1847-1848).
« Haïtiens ! Une longue oppression avait pesé sur Haïti ; votre courage et des efforts héroïques, l'ont arraché, il y a 22 ans à la dégradation pour l'élever au niveau des États indépendants. Mais il manquait à votre gloire un autre triomphe. Le pavillon français en venant saluer cette terre consacre en ce jour la légitimité de votre émancipation. Il était réservé au Monarque aussi grand que religieux qui gouverne la France de signaler son avènement à la couronne par un acte de justice qui illustre à la fois et le trône dont il émane et la nation qui en est l'objet.
Haïtiens, une ordonnance spéciale de sa majesté Charles X, en date du 17 avril dernier, reconnaît l'indépendance pleine et entière de votre gouvernement. Cet acte authentique en ajoutant la formalité du droit à l'existence politique que vous aviez acquise, légalisera aux yeux du monde, le rang où vous vous êtes placés et auquel la Providence vous appelait.
Citoyens, le commerce et l'agriculture vont prendre une plus grande extension. Les arts et les sciences qui se plaisent dans la paix s'empresseront d'embellir vos nouvelles destinées de tous les bienfaits de la civilisation. Continuez, par votre attachement aux institutions nationales, et surtout par votre union, à être le désespoir de ceux qui tenteraient de vous troubler dans la juste et paisible possession de vos droits.
Soldats ! Vous avez bien mérité de la patrie. Dans toutes les circonstances, vous avez été prêts à combattre pour sa défense, vous serez toujours fidèles à vos devoirs. La confiance dont vous avez donné tant de preuves au chef de l'État est la plus douce récompense de sa sollicitude constante pour la prospérité et la gloire de la République
Haïtiens ! Montrez-vous toujours dignes de la place honorable que vous occupez parmi les nations. Et plus heureux que vos pères, vous léguerez à votre postérité le plus bel héritage qu'elle puisse désirer : la concorde intérieure, la paix au dehors, une patrie florissante et respectée ! Vive à jamais la liberté ! Vive à jamais l’indépendance ! »
Annexes 9. De la dette à la double dette.
Annexe 9.1. Déclaration de la Chambre des représentants, le 20 février 1826, loi acceptée par le Séant le 25 février 1826 et promulguée le 26 février 1826, cité in Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.6 [consultable en Google Book], p. 508.
La Chambre des Représentants des Communes,
"Considérant qu'il a été consenti en faveur de la France une indemnité de 150 millions de francs pour la reconnaissance de l'Indépendance pleine et entière de la République d'Haïti et qu'il est de l'honneur national d'assurer l'exécution d'un engagement qui, sans porter atteinte à la dignité du peuple haïtien, consacre à jamais son existence politique ;
"Sur la proposition du Président d'Haïti et sur le rapport de sa section des finances ;
"A arrêté et arrête ce qui suit
"Article 1er.- L'indemnité de 150 millions de francs consentis à la France pour la reconnaissance pleine et entière de l'indépendance nationale, est reconnue dette nationale.
"Article 2.- Le Président d'Haïti prendra les mesures que sa sagesse lui suggérera pour libérer la nation de cette dette."
Annexe 9.2. Blancpain François, Gainot Bernard, « Les négociations des traités de 1838 » [https://journals.openedition.org/lrf/2757]
[…] les difficultés d’application des conditions de l’ordonnance.
Certes, tous les États européens reconnaissent l’indépendance d’Haïti, mais les États-Unis la refusent. En outre, le gouvernement américain exclut Haïti du Congrès de Panama qui réunit tous les nouveaux pays indépendants d’Amérique. Il faudra attendre la guerre de sécession pour qu’un ambassadeur noir puisse être agréé à Washington.
Les Haïtiens firent quelques efforts pour essayer d’appliquer l’impossible : une tentative de hausse des impôts sans résultat notable, et un arrêté du 15 décembre 1826 qui supprime le demi droit de douane en faveur de la France.
Boyer dépêche Frémont et Rouanez à Paris pour un emprunt de 30 millions permettant de payer le premier terme.
L’emprunt est placé le 4 novembre 1826 aux conditions suivantes : 24 millions versés à Haïti, 6 millions pour frais et primes des banquiers, à cause des risques de banqueroute. L’emprunt portait un intérêt de 6 % l’an.
Pour le paiement du premier terme, le gouvernement haïtien réunit : 24 millions produits de l’emprunt, 5,3 millions du Trésor public haïtien, 0,7 million payé plus tard.
S’en suivent diverses négociations, sans résultat, pour aménager les conditions de paiement.
Boyer rappelle en Haïti son négociateur à la nouvelle de la chute de Charles X. C’est la rupture des relations entre la France et Haïti.
En 1831, la situation est inquiétante : 120 000 000 de francs restent dus. S’y ajoutent les 700 000 francs impayés du premier terme (ils seront payés en 1838), 4 848 900 francs, représentant l’avance du Trésor public français pour les échéances de l’emprunt pour les années 1826 et 1827, 27 600 000 francs de solde en principal de l’emprunt, et 5 796 000 francs pour les intérêts échus de l’emprunt. Tout cela représente au total une dette de 158 944 900 francs.
Haïti craint une intervention militaire de la France et prévoit la création d’une ville dans les hauteurs, hors de la portée des canons. Cette ville, sur les mornes de Port-au-Prince, s’appellera Pétionville.
Annexe 9.3. Denis Watson, « Série de dettes publiques contractées par Haïti sur le marché intérieur et extérieur au XIXe siècle (1825-1911). (De la double dette de l’indépendance aux emprunts de la Consolidation et pour la création de la Banque Nationale de la République d’Haïti) », Le Nouvelliste, 6 juin 2022, [https://lenouvelliste.com/article/236244/serie-de-dettes-publiques-contractees-par-haiti-sur-le-marche-interieur-et-exterieur-au-xixe-siecle-1825-1911].
Le premier emprunt international de l’État haïtien, celui de 1825, souscrit en France à la suite de l’ordonnance du 17 avril 1825 du roi de France, Charles X, relativement à la reconnaissance de l’Indépendance d’Haïti, marquera les annales de l’histoire économique et financière du pays [1]. Cet emprunt, qui défraya la chronique à l’époque, scella l’entrée tonitruante d’Haïti dans la spirale infernale de la dette internationale. Cet emprunt originel génèrera, à bien des égards, les emprunts ultérieurs comme ceux de 1875 et de 1896 – contractés toujours en France qui servait de « caisse privilégiée mais obligeante » à l’égard d’Haïti.
L’ensemble de ces dettes d’Haïti, sans être amorties par une gamme de production conséquente et des échanges commerciaux importants, ont abouti à des crises économiques et financières [2].
[1] Voir l’ordonnance royale de 1825, Annexe 8.1.
[3] Je tiens à souligner que ce n’est pas la dette en soi qui pose problème, mais une mauvaise transaction dans les négociations pour l’obtenir et la mauvaise utilisation des fonds. En général, un prêt ou un emprunt mal utilisé se convertit en une dette sèche, non productive, socialement non rentable à court, moyen et long terme et préjudiciable aux intérêts de l’État (dans le cas qui nous concerne).
Annexe 9.4. John Quincy Adams, Président des Etats-Unis, au Sénat le 28 mai 1826, au sujet de l’ablolition de la traite, dans le cadre du Congrès de Panama, cité in Madiou Thomas, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol.6 [consultable en Google Book], p. 525.
Quant à ce qui concerne l'ile d'Haïti, il conviendrait de mettre préalablement en délibération si l'assemblée devra s'occuper de son état politique actuel. La Constitution de ce pays renferme des principes qui, jusqu'à présent, ont empêché le gouvernement des Etats-Unis de le reconnaître comme Etat souverain et indépendant. De nouveaux motifs doivent nous faire persévérer dans cette détermination depuis que, pour prix d'une indépendance illusoire qu'ils ont acceptée d'un prince étranger, les Haïtiens ont accordé à sa nation des avantages exclusifs de commerce qui tiennent de la nature d'un vasselage colonial et qui ne leur laissent qu'une ombre d'indépendance.
Nos plénipotentiaires seront chargés de présenter ces considérations à l'assemblée de Panama, et dans le cas qu'elle ne serait pas du même avis que nous, ils auront l'ordre de se refuser à tout arrangement qui reposerait sur d'autres bases.
Annexe 9.5. Convention conclue à Paris, le 2 avril 1831, entre la France et Haïti, pour le règlement des indemnités, in Léger Jacques Nicolas, Recueil des traités et conventions de la République d'Haïti, Imprimerie de la Jeunesse, Maison Athanase Laforest, 1891, pp. 7 [accessible en Google Book].
Le Président de la République d'Haïti, après avoir exprimé à S. M. le Roi des Français tous ses regrets de l'impossibilité où s'était trouvée, et se trouve encore la République, d'acquitter sans des délais suffisants, les quatre derniers cinquièmes de l'indemnité stipulée par l'ordonnance du 17 Avril 1825, aussi bien que de faire le service de l'emprunt contracté à Paris, le 14 Novembre de la même année, pour le paiement du premier cinquième de la dite indemnité, a fait connaitre qu'une somme annuelle de 4 millions de francs était aujourd'hui, et serait pendant longtemps le maximum des ressources que la République pourrait appliquer à l'extinction de ces deux dettes, ainsi que de la dette nouvelle résultant d'avances qui lui ont été faites par le trésor public de France pour le service de son emprunt.
[…] En conséquence, S. M. le Roi des Français a nommé M. le baron Louis André Pichon, Conseiller d'Etat, Officier de la Légion d'honneur ; Et le Président de la République d'Haïti le citoyen Saint-Macary, Administrateur des finances.
Lesquels, après avoir échangé leurs pouvoirs qu'ils ont trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :
Art. 1er. La dette d'Haïti envers la France se compose :
1° De la somme de cent vingt mallions sept cent mille francs pour le solde de l'indemnité, savoir : cenl-vingt millions, montant des quatre derniers cinquièmes de la dite indemnité et une somme de sept cent mille francs qui, sauf règlement de compte définitif, entre le trésor d'Haïti et la Caisse des dépôts et consignations, restait dûe pour compléter le premier cinquième.
2° De la somme de quatre millions huit cent quarante-huit mille francs, pour les avances faites par le trésor public de France pour le service de l'emprunt :
3° Enfin des obligations non remboursées de l'emprunt, montant à vingt sept millions sis cent mille francs, et des intérêts dûs sur cette somme, depuis le 31 Décembre 1828, lesquels, au 31 Décembre prochain, s'éleveront à la somme de cinq millions sept cent quatre vingt-seize francs ; ce qui, en capitalisant les dits intérêts jusqu'au 31 Décembre 1831, formera à celte même époque , un total de trente trois millions trois cent quatre vingt seize francs , pour le capital du dit emprunt.
Art . 2. - Le Gouvernement d'Haïti s'engage à employer annuellement, et à partir du premier Janvier 1832, à l'extinction des diverses parties de la dette ci-dessus exprimée, la somme de quatre millions de francs .
Art. 3. - Sur ces quatre millions, S. M. le Roi des Français consent à ce qu'il soit affecté, par préférence, au service de l'emprunt, une somme de deux millions, qui seront à cet effet, versés chez les banquiers chargés des affaires de la République à Paris, en deux paiements égaux, de six mois en six mois, le premier devant se faire le 30 Juin 1832.
L'autre somme de deux millions sera versée en deux paiements semblables et aussi de six mois en six mois, à la Caisse des dépôts et consignations à Paris pour venir, jusqu'à due concurrence, en déduction du solde restant dû sur l'indemnité ; et après le remboursement de l'emprunt, le Gouvernement d'Haïti s'engage à continuer le paiement de l'annuité ci-dessus stipulée de quatre millions et à la verser, à Paris, à la Caisse les dépôts et consignations, jusqu'à parfait paiement de l'indemnité. Le premier des paiements à faire pour l'indemnité aura lieu immédiatement après l'acquittement en la manière qui va être énoncée ci- après, des avances mentionnées au paragraphe 2 de l’art. premier de la présente convention.
Art. 4. - Le Gouvernement Haïtien s'engage à rembourser, d'ici au 31 Décembre 1883, tant en capital qu'en intérêts, (les dits intérêts fixés à 3 %) sa delle envers le trésor public de France, pour les avances faites pour le service de l'emprunt. Ainsi, en outre des deux millions, affectés par le premier paragraphe de l'article 3, au paiement de l'emprunt, et qui seront remis aux banquiers de la République à Paris, le Gouvernement Haïtien versera, à la Caisse des dépôts et consignations, pendant les deux premières années, aux époques et dans les proportions indiquées audit article, les sommes nécessaires pour parfaire ce remboursement dans ledit délai.
Art. 5. – S. M. désirant faciliter encore la libération de la République, consent à faire acheter, chaque année, du Gouvernement d'Haïti, par l'Administration les contributions indirectes de France, des tabacs en feuilles des qualités, pour des quantités, et aux prix qui seront convenus entre les agents des administrations respectives. La valeur des tabacs qui seraient livrés par Haïti, en vertu de ces contrats, viendra en déduction des paiements à faire par la République pour l'acquittement de ses dettes.
Annexe 10. Les deux traités de 1838
Les deux traités de 1838, in Outre-mers, tome 90, n°340-341, 2e semestre 2003, Haïti Première République Noire, pp. 251-252 [https://www.persee.fr/doc/outre_1631-0438_2003_num_90_340_4059]. D'après Thomas Madiou, Histoire d'Haïti, Port-au-Prince, Éditions Henri Deschamps, 1988, tome VII, p. 213-215 (réimpression de l'édition de 1847-1848).
Premier traité
Au nom de la très-sainte et indivisible Trinité.
S.M. le roi des Français et le Président de la République d'Haïti, désirant établir sur des bases solides et durables les rapports d'amitié qui doivent exister entre la France et Haïti, ont résolu de les régler par un Traité, et ont choisi à cet effet pour Plénipotentiaires, savoir :
S.M. le roi des Français : les sieurs Emmanuel-Pons-Dieudonné, baron de Las Cases, et Charles Baudin, Capitaine de vaisseau de la marine royale.
Le Président de la République d'Haïti : le Général de brigade Joseph-Balthazar Inginac, Secrétaire-général ; le sénateur Marie-Élisabeth-Eustache Frémont, Colonel, son aide-de-camp ; les sénateurs Dominique-François Labbée et Alexis Beaubrun Ardouin, et le citoyen Louis-Mesmin Seguy Villevaleix, Chef des bureaux de la Secrétairerie générale.
Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs respectifs, et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :
Article premier.
S.M. le roi des Français reconnaît pour lui, ses héritiers et successeurs, la République d'Haïti comme État libre, souverain et indépendant.
Article 2.
Il y aura paix constante et amitié perpétuelle entre la France et la République d'Haïti, ainsi qu'entre les citoyens des deux États, sans exception de personnes ni de lieux.
Article 3.
S.M. le roi des Français et le Président de la République d'Haïti se réservent de conclure le plus tôt possible, s'il y a lieu, un traité spécialement destiné à régler les rapports de commerce et de navigation entre la France et Haïti. En attendant, il est convenu que les Consuls, les citoyens, les navires et les marchandises ou produits de chacun des deux pays jouiront à tous égards, dans l'autre, du traitement accordé ou qui pourra être accordé à la nation la plus favorisée ; et ce, gratuitement, si la concession est gratuite, ou avec la même compensation, si la concession est conditionnelle.
Article 4.
Le présent Traité sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Paris, dans un délai de trois mois ou plus tôt, si faire se peut.
En foi de quoi, nous Plénipotentiaires, soussignés, avons signé le présent Traité et y avons apposé notre sceau.
Emmanuel, Baron de Las Cases, Membre de la Chambre des Députés de France,
Charles Baudin.
B. Inginac, E. Frémont, Labbée, B.Ardouin, Seguy Villevaleix.
_________________________________
Deuxième traité
« Au nom de la Très Sainte et indivisible Trinité. Sa Majesté le Roi des Français et le Président de la République d'Haïti, désirant d'un commun accord mettre un terme aux difficultés qui se sont élevées relativement au paiement des sommes que la république d'Haïti doit à la France sur l'indemnité stipulée en 1825, ont résolu de régler cet objet par un traité, et ont choisi à cet effet pour plénipotentiaires, savoir, Sa Majesté le Roi des Français, les sieurs Emmanuel Pons Dieudonné, baron de Las Cases, officier de l'ordre royal de la Légion d'honneur, et Charles Baudin, officier du dit ordre royal de la Légion d'honneur et capitaine de vaisseau de la Marine Royale. Le Président d'Haïti, le général de brigade Joseph Balthazar Inginac, secrétaire général ; le sénateur Marie Elizabeth Eustaches Frémont, colonel, son aide de camp ; les sénateurs Dominique François Labbée et Alexis Beaubrun-Ardouin et le citoyen Louis-Mesmin Seguy Villevaleix, chef de bureau de la Secrétairerie générale. Lesquels après avoir échangé leurs pleins pouvoirs et les avoir trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :
Article 1er. Le solde de l'indemnité dû par la République d'Haïti demeure fixé à la somme de 60 millions de francs. Cette somme sera payée conformément au mode ci-après : pour chacune des années 1838, 1839, 1840, 1841 et 1842, un million cinq cent mille francs. Pour chacune des années 1843, 1844, 1845, 1846 et 1847, un million six cent mille francs. Pour chacune des années 1848, 1849, 1850, 1851 et 1852, un million sept cent mille francs. Pour chacune des années 1853, 1854, 1855, 1856 et 1857, un million huit cent mille francs. Pour chacune des années 1858, 1859, 1860, 1861 et 1862, deux millions quatre cent mille francs. Pour chacune des années 1863, 1864, 1865, 1866 et 1867, trois millions de francs.
Les dites sommes seront payées dans les six premiers mois de chaque année. Elles seront versées à Paris, en monnaie de France, à la Caisse des dépôts et consignations.
Article 2. Le paiement de l'année 1838 sera effectué immédiatement.
Article 3. Le présent traité sera ratifié et les ratifications seront échangées à Paris dans un délai de trois mois, ou plus tôt si faire se peut.
En foi de quoi, nous plénipotentiaires soussignés, avons signé le présent traité et y avons apposé notre sceau.
Fait au Port-au-Prince, le 12e jour du mois de février de l'an de grâce 1838. Emmanuel, baron de Las Cases, Charles Baudin, B. Inginac, Frémont, Labbée, B. Ardouin, Seguy Villevaleix. »
Annexes 11. Les réactions en Haïti
Annexe 11.1. Thomas Madiou, Histoire d’Haïti 1492-1843, Port-au-Prince, Port-au-Prince, JH. Courtois, 1847, vol. 6, pp. 476-477 [consultable en Google Book].
La nouvelle de la reconnaissance de l’Indépendance d’Haïti par le roi de France, moyennant une indemnité de 150 millions de francs, était parvenue au Cap le 17 juillet, en même temps que la proclamation du président au peuple et à l’armée. La plupart des généraux du Nord se montrèrent mécontents de la conduite du président Boyer et le bruit circula aussitôt dans les villes et les campagnes qu’il avait livrées le pays aux Français. Il y eut des conciliabules dans le but de travailler à son renversement. Cependant le général Magny, commandant de l’arrondissement du Cap, réunit le 19 juillet, au Champ de Mars, les troupes de ligne et la garde nationale et leur donna lecture de la proclamation du Président qui annonçait la reconnaissance de l’indépendance d’Haïti. Les troupes accueillirent cet acte avec froideur, mais les citoyens avec enthousiasme. Pendant trois jours, la ville fut illuminée et il y eut de nombreux bals et festins.
Dans le département de l’Artibonite que commandait le général Bonnet, l’ordonnance de Charles X fut accueillie avec moins de désapprobation. Le général Bonnet était heureux de ce qui s’était accompli au Port-au-Prince. Il sentait, il est vrai, péniblement que les conditions de l’ordonnance étaient onéreuses ; néanmoins, il y voyait la consécration de l’œuvre de Dessalines et la fin des appréhensions d’une nouvelle existence barbare et demi-sauvage dans les plaines et les mornes. Il inspira ces sentiments à la plupart des autorités de l’Artibonite, et dans ce quartier, il y eut de grandes fêtes populaires pour solenniser la reconnaissance de l’indépendance d’Haïti.
Boyer, dès le 22 juillet, fut informé qu’une vaste conspiration s’était formée contre lui dans le Nord parce qu’il avait, prétendait-on, livré le pays aux blancs.
Annexe 11.2. Beaubrun Ardouin, Études sur l’histoire d’Haïti ; suivies de la vie du général J.-M. Borgella, Paris, Dezobry et Magdeleine et chez l’auteur, tome X, 1860. [disponible sur Gallica et en Wikisource].
Le gouvernement haïtien avait pris une grande résolution, en se décidant à accepter l’ordonnance rendue par Charles X sur la question qui se débattait entre la France et Haïti depuis la paix générale de 1814. Mais, si le président Boyer personnellement hésita à souscrire à cet acte, parce qu’il ne lui sembla pas réunir toutes les garanties désirables pour l’indépendance et la souveraineté de son pays ; s’il crut cependant pouvoir se confier en la loyauté du gouvernement français pour terminer définitivement ce long litige par un traité subséquent, d’après la note officielle qu’il obtint de son envoyé, expliquant les clauses de l’ordonnance, il ne pouvait pas raisonnablement espérer qu’aucune répugnance ne se manifesterait dans le pays, à propos de cette transaction, et par les mêmes motifs qu’il avait eus pour ne pas vouloir la conclure.
Quelque confiance qu’un chef d’État inspire à ses concitoyens, l’opinion publique ne saurait abdiquer son droit d’examen de ses actes, surtout lorsqu’ils se rattachent à l’existence politique de la nation. Elle le pouvait d’autant moins en cette circonstance, que, durant toute l’année 1824, elle avait été surexcitée à l’endroit de la France, par le Président lui-même. Ses discours à la fête de l’indépendance et à l’ouverture de la session législative ; ses proclamations du 6 janvier, du 14 avril et du 18 octobre ; ses instructions aux commandans d’arrondissement pour mettre la République en état de défense ; la réunion de ces généraux à la capitale où ils conférèrent avec lui secrètement : tout avait préparé les esprits à résister vigoureusement à toutes prétentions injustes de la part de la France. Est-il donc étonnant, qu’en apprenant les particularités relatives à l’acceptation de l’ordonnance ; en lisant cet acte sur le journal officiel du gouvernement sans y trouver aussi la note de M. de Mackau ; en sachant que cet officier avait emmené à sa suite une force maritime qui pénétra dans la rade du Port-au-Prince ; est-il étonnant qu’on ait montré presque partout un sentiment de mécontentement, sinon d’indignation, de la conduite mal comprise de Boyer ?
Mais il était plus naturel que ce sentiment éclatât dans le Nord, où le long régime de H. Christophe avait toujours excité la méfiance et la haine contre la France, où existait une opposition permanente contre le système du gouvernement, surtout parmi les anciens généraux du régime déchu qui avaient essayé d’y établir un État distinct de la République. Au Cap-Haïtien, le général Magny, qui ne partageait pas leur sentiment, qui s’était pénétré des grandes vues politiques de Pétion, suivies par son successeur à l’égard de la France, en recevant l’information officielle de ce qui s’était passé à la capitale, avait fait publier avec pompes la proclamation du Président, du 11 juillet ; par ses soins, le chef-lieu du Nord fut illuminé pendant trois jours de suite. Ces démonstrations, calculées sans doute pour rallier l’opinion en faveur du gouvernement, déplurent singulièrement aux généraux du Nord et à d’autres officiers, à des fonctionnaires publics et à des particuliers : ils manifestèrent si hautement leur désapprobation de la conduite tenue au Port-au-Prince, que Magny jugea la situation assez grave pour la mander à Boyer et l’engager à se transporter au Cap-Haïtien.
[…] il n’y eut que trop de gens satisfaits de cette espèce d’échec subi par son gouvernement, parmi ceux qui lui étaient opposés personnellement. Malheureusement, — nous l’avons déjà dit. — il avait eu le tort de ne pas imiter la conduite de Pétion, il avait négligé ce qui pouvait le plus excuser, sinon justifier la sienne ; et quand il apprit que de tous côtés on lui jetait la pierre, quand les journaux étrangers vinrent augmenter cette fâcheuse situation par leurs réflexions plus ou moins acerbes sur l’acceptation de l’ordonnance, le Président se laissa aller à une sorte de dégoût dans ses rapports avec les fonctionnaires et les citoyens. Dès cette époque, il n’eut plus cet enthousiasme qu’il avait toujours montré dans les affaires publiques. Il continua, certainement, de prouver la fermeté, l’énergie de son âme dans les circonstances difficiles qui survinrent ensuite ; mais on peut dire qu’il était désenchanté du pouvoir. Son caractère était trop impressionnable pour ne pas l’être.